Vers un rectorat de "seconde zone" ?

Depuis quelques semaines, les nouvelles missions du rectorat de Poitiers dont l'unanimité contre elles. Le débat sur la domination de Bordeaux en Nouvelle-Aquitaine agite le spectre d'un territoire à deux vitesses.

Romain Mudrak

Le7.info

C’est l’Unsa-Education qui a allumé la mèche le premier. Le 5 juillet, son représentant local Jean-François Roland dénonce dans un communiqué « l’avenir sombre du rectorat de Poitiers ». La veille, Armel de la Bourdonnaye et ses deux homologues de Limoges et Bordeaux présentaient les nouvelles missions octroyées dès janvier 2020 aux trois délégations territoriales. S’il était acté depuis plusieurs mois qu’en Nouvelle-Aquitaine les services de l’Education nationale seraient réorganisés en pôles, les détails n’étaient pas encore connus des personnels. C’est maintenant fait. Poitiers se voit attribuer la direction régionale du numérique éducatif, en lien avec les opérateurs nationaux Cned et Canopé, ainsi que le service interacadémique de la formation des personnels d’encadrement, en lien avec l’IH2EF (ex-Esenesr). Lui revient aussi la gestion des fonds européens. La gestion des personnels enseignants reste de sa compétence pour les quatre départements de son territoire, tout comme les services informatique, juridique, statistiques ainsi que les examens et concours.

En interne, l’Unsa-Education s’inquiète de voir que « le budget opérationnel qui gère les personnels non enseignants sera unique et placé à Bordeaux ». « Cela laisse craindre une gestion centralisée des personnels administratifs », ajoute Jean-François Roland qui évoque déjà la disparition de trente emplois de ce type en 2020, après treize en 2019, contre seulement neuf à Bordeaux, « une académie deux fois plus grosse que la nôtre ».

Blanquer « ouvert à des évolutions »
A l’université de Poitiers, l’idée de voir s’éloigner le centre de décision n’a pas plu davantage. Son conseil d’administration a également réagi mi-juillet : « La réforme présentée consiste en une concentration exceptionnelle à Bordeaux de toutes les fonctions d’animation et de pilotage des politiques d’éducation et d’enseignement supérieur, de recherche et d’innovation, au détriment du territoire de Poitiers et de ses habitants. » De quoi reléguer les services de la rue Guillaume-le-Troubadour dans la catégorie des rectorats de « seconde zone ». Alors que Jean-Michel Blanquer a plusieurs fois parlé de Poitiers comme de la capitale de l’Education nationale, cette annonce passe mal. Surtout qu’elle devrait logiquement s’accompagner de mutations de fonctionnaires vers la Gironde. Le débat sur la perte d’influence de Poitiers revient en force. Le maire de la ville, Alain Claeys, qui a découvert la réforme « dans la presse », s’est dit fermement opposé à ce projet. Il faut dire que même le député LREM Sacha Houlié, pourtant dans le camp du ministre, a alerté ce dernier sur « les insuffisantes concertations, l’inégale répartition des services et la légitime crainte autour des réductions d’effectifs ». Selon lui, Jean-Michel Blanquer « s’est dit ouvert à des évolutions ». A suivre.

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