Méfions-nous des solutions simples… 
et de ceux qui les proclament

Le Regard de la semaine est signé Lionel Bertrand

Le7.info

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Contrairement à ce que l’on pourrait croire, tous les problèmes ne sont pas de même nature. Un pneu crevé, par exemple, est ce qu’on appelle un problème simple. Sa cause est généralement évidente -un clou ou un éclat de verre- et sa solution connue : une rustine, un peu de colle, et le tour est joué. Si tous les problèmes de notre monde étaient aussi simples à résoudre, il n’y aurait pas d’échec scolaire, peu de chômage, pas de délinquance, et nous aurions depuis longtemps endigué le réchauffement climatique. Est-ce le cas ? Non. Peut-on dire, pour autant, que rien n’a été tenté ? Là encore, non.

La raison de ces échecs tient à la nature même des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Ce sont des problèmes 
dits « complexes ». Leurs causes sont multiples, profondes, parfois invisibles, souvent imbriquées. Et leur résolution ne peut reposer sur une approche unique ou simpliste.

Prenons l’exemple de la délinquance. Si on la traite comme un simple pneu crevé, on conclura vite qu’il s’agit d’un problème d’autorité, qu’il faut plus de contrôles, plus de fermeté, plus de places en prison. Cette réponse est-elle suffisante ? Non. Parce que la délinquance est aussi -et peut-être d’abord- le symptôme d’inégalités sociales persistantes. Elle a des racines économiques, culturelles, scolaires, familiales, psychologiques. Le travail des forces de l’ordre et de la justice est bien sûr essentiel, mais il ne peut porter ses fruits durablement sans une action conjointe : politiques éducatives, inclusion, soutien aux familles, répartition plus juste des richesses, renforcement du lien social. On aimerait que tout cela soit plus simple. Mais ça ne l’est pas. Et quiconque prétend le contraire devrait inspirer davantage de méfiance que de confiance. Nous faisons aujourd’hui face à des défis d’une ampleur inédite : effondrement de la biodiversité, réchauffement climatique, inégalités croissantes, sentiment d’abandon dans de nombreuses franges de la population. Face à ces défis, nous avons besoin de coopération, de lucidité, et de solutions systémiques. Pas de boucs émissaires.

Quand Roosevelt lança le New Deal, au sortir de la Grande Dépression, il ne désigna aucun coupable. Il choisit de rassembler. Il fit repartir son pays avec tous, sans en laisser aucun de côté. Face aux défis qui se dressent aujourd’hui devant nous, restons humbles. Méfions-nous de ceux qui proposent des solutions trop simples à des problèmes trop complexes. Et refusons de donner du crédit à celles et ceux qui préfèrent désigner des coupables plutôt que de construire, ensemble, des réponses durables.

CV express
Aujourd’hui coach de dirigeants, coach d’équipes et conférencier après avoir été ingénieur dans l’industrie et co-dirigeant de l’entreprise Rannou-Métivier. Passionné par les relations humaines, par tout ce qui élève, apaise, relie. Sensible, un brin perfectionniste. 

J’aime : mes deux merveilleux enfants, le Centre des jeunes dirigeants, le théâtre d’impro, la rando, les relations authentiques, la place qu’elles offrent à la vulnérabilité et ce qu’elles permettent de faire émerger de beau, de juste.

J’aime pas : les relations de pouvoir qui abîment et bloquent le développement, la domination, le chantage, la vengeance, la fermeture, le rejet, la victimisation, la culpabilisation.  

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