Cyriaque : « Cord’âges m’a redonné le sourire »

Malades, personnes isolées, aidants, accidentés de la vie... Cette saison, Le 7 ouvre ses colonnes aux bénéficiaires des Ateliers Cord’âges, un lieu poitevin à nulle autre pareille. Deuxième volet avec Cyriaque Dangel. 37 ans, sur un chemin de renaissance après un passé chaotique.

Arnault Varanne

Le7.info

Cord’âges
« Ça fait à peu près deux ans que je viens ici, entre trois et quatre fois par semaine, sur les conseils d’Espoir 86. La première fois que j’ai franchi la porte de Cord’âges, on m’a dit que je devais être ici comme chez moi. Ça m’a touché. Comme le moment où Véronique (David, directrice, ndlr) a posé les mains sur mes épaules lors d’un spectacle où ma fille de 6 ans dansait. A Cord’âges, on peut parler de nos problèmes mais pas seulement, échanger avec les autres et faire des activités aussi. Moi, je participe aux ateliers de l’intime et je suis même devenu bénévole sur la gym douce et le sport adapté. Je passe un peu du statut d’aidé à aidant. C’est paradoxal mais j’aime soutenir les autres, alors que j’ai eu des difficultés à me soutenir moi-même... »

« Une bulle autour de moi. »

 La maladie
« En fait, je suis arrivé à Cord’âges au début de mon parcours de soins. J’ai été hospitalisé une première fois à Henri-Laborit après une décompensation. On m’a diagnostiqué une schizophrénie. J’ai pu travailler un peu entre temps comme auxiliaire de vie, mais le rythme était trop intense. J’ai été réhospitalisé il y a un an, ça va mieux aujourd’hui car je suis sous injection et mon humeur est stabilisée. Le CMP, les rendez-vous avec la psychologue à Créative, avec le médecin, Cord’âges... Tout ça m’a permis de créer une bulle autour de moi. J’ai aussi soigné une addiction au cannabis. J’étais vraiment au fond du gouffre. »

« J’ai aussi vécu un peu dans la rue. »

Un passé douloureux
« Je suis né à Lyon, puis ma mère a décidé de partir à Strasbourg jusqu’à ce que j’ai 13 ans. On est ensuite retourné à Lyon. J’ai vécu des drames qui m’ont conduit à fuir. J’ai perdu deux proches... Je me suis retrouvé en foyer pendant deux ans, où j’ai moi-même subi de la maltraitance. J’ai aussi vécu un peu dans la rue. Après, j’ai fait un apprentissage en vente et un CAP carrosserie. Ça m’a mis le pied à l’étrier. A Poitiers, j’y suis venu pour le travail, je me suis engagé dans l’armée. Ça a été des hauts et des bas. Ce passé, ça fait partie de moi, je le sais, mais désormais je vais de l’avant. »

« Emma me fait grandir et moi aussi je la fais grandir. »

Emma, son trésor
« Quand je suis devenu père, je crois que je n’étais pas prêt, pas tout à fait... On s’est séparé avec sa mère. Aujourd’hui, Emma a 6 ans et je voudrais l’avoir une semaine sur deux. Ça veut dire trouver un travail, une stabilité. Je me suis longtemps posé la question de comment éduquer un enfant quand on a soi-même eu une éducation bafouée ? Cela dit, je n’ai jamais manqué d’amour de la part de ma mère... Emma me fait grandir et moi aussi je la fais grandir. On partage pas mal de choses. »

L’avenir
« Je me reconstruis dans tous les sens du terme. J’étais une gueule cassée avec une rangée de dents de devant à changer... Maintenant, je peux sourire à ma fille et à tout le monde. Cord’âges m’a redonné le sourire. J’aimerais être accompagnant éducatif et social. Comme je suis RQTH (reconnaissance de qualité de travailleur handicapé, ndlr), je peux faire un apprentissage pour accéder à ce métier. Ça va venir, je le sais. Les choses sont en train de se résoudre petit à petit. J’ai appris à apaiser mes colères, à gérer la solitude. Je me sens de mieux en mieux. Dans dix ans ? Je serai toujours sur Poitiers, encore plus épanoui. Je rêve d’aider les autres, comme Nicole avec son jardin, et de voyages aussi. »

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