Hier
Qui l’eut crû ? Les bactéries pourraient être la solution à bien des maux humains et, par extension, les selles le secret de la guérison de certaines maladies. La transplantation fécale a déjà fait ses preuves contre certaines infections.
« Notre corps contient plus de bactéries, virus ou parasites que de cellules humaines. » Voilà qui, pour le moins, oblige à l’humilité. « Nous avons 10 puissance 13 cellules humaines et 10 puissance 14 bactéries en nous », complète, chiffres à l’appui, le Pr Burucoa, responsable du service bactériologie et hygiène au CHU de Poitiers. Pas d’affolement ! « Les bactéries sont indispensables, elles éduquent notre système immunitaire, rassure-t-il aussitôt. Avant on parlait de flore, mais on ne connaissait que 20% des bactéries. » Aujourd’hui, le terme générique pour désigner tous ces organismes microscopiques (bactéries, virus, parasites, insectes...) est celui de microbiote, lequel concentre nombre d’espoirs de la médecine. Exit donc certaines théories hygiénistes. « Chacun a son propre microbiote, composé de plus de 1 000 bactéries différentes et qui raconte sa vie et celle de ses ancêtres », poursuit le spécialiste.
Véritable concentré, les selles contiennent 10 puissance 11 bactéries par gramme et ont des vertus médicales certaines, mises en avant notamment à travers la transplantation fécale, par injection dans le duodenum -sous l’estomac pour éviter des reflux gastriques désagréables-, par coloscopie voire par absorption de granulés de matière sèche.
Mais qui dit transplantation fécale, dit donneur de selles, soit le risque d’inoculer au malade une pathologie dont le donneur serait inconsciemment porteur. Le questionnaire de santé à plusieurs pages, auquel le Pr Burucoa a participé, est donc complété par des tests biologiques multiples. A l’issue, seuls « 10% des dons » sont acceptés.
Nombreux essais cliniques
La méthode de transplantation fécale n’est ni très appétissante, ni tout à fait récente puisqu’on en retrouve trace « dans des manuels chinois de plus de 1 000 ans ». En France, elle n’est jusqu’à présent autorisée comme médicament que pour des patients atteints d’une forme grave d’infection à clostridium difficile, avec « un taux de guérison de 95% ». Cette diarrhée infectieuse nosocomiale est provoquée par une dégradation du microbiote, due à des maladies ou à des traitements antibiotiques. Elle touche entre 200 et 300 personnes par an en France, deux ou trois à Poitiers, « souvent des personnes âgés, immunodéprimées », qui sont dirigées vers Nantes, Paris, Lyon ou Lille pour recevoir leur traitement.
Parallèlement, « des essais cliniques sont menés dans le monde entier sur d’autres pathologies comme la maladie de Crohn, l’obésité, la schizophrénie, l’autisme... », énumère le Pr Burucoa. En France, il y a une dizaine de protocoles actuellement en cours. » La littérature médicale internationale regorge donc d’articles sur le microbiote, qui est loin d’avoir livré tous ses secrets.
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lundi 23 décembre