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Chantal Blanc face à l’inceste
Catégories : Société, Social, Solidarité Date : mardi 12 novembre 2019Après avoir exercé dans le secteur médico-social, notamment dans la Vienne, Chantal Blanc vient de publier Un été à la campagne, un roman abordant le sujet de l’inceste. Ce récit de fiction est directement inspiré par des histoires d’enfants qu’elle a accompagnés pendant quarante ans de carrière.
Elle a commencé à l’écrire il y a quinze ans, alors qu’elle exerçait encore dans le secteur médico-social. Chantal Blanc a couché sur le papier le parcours d’une petite fille de 10 ans -qu’elle ne nomme pas- victime d’un inceste. Ce qui ne devait être qu’une nouvelle est aujourd’hui un roman, Un été à la campagne, publié aux éditions du Panthéon.
« J’ai choisi de parler de l’inceste pour montrer qu’il peut y avoir des conséquences graves sur un enfant, son devenir. Un enfant victime, c’est une bombe à retardement », explique l’auteure. Ces conséquences, Chantal Blanc ne les a que trop longtemps observées dans sa carrière. Pendant plus de quarante ans, elle a dirigé des établissements recevant des mineurs placés par décision de justice ou par l’Aide sociale à l’enfance (Ase), délinquants ou maltraités, parfois les deux. Dans la Vienne puis dans l’Indre. « J’y ai côtoyé plus de 4 000 gamins. » Bon nombre d’histoires, très difficiles, ont nourri ce premier roman. « Elles sont vraies, je n’ai rien inventé. »
« Un combat contre l’indifférence »
Derrière l’œuvre de fiction, Chantal Blanc a souhaité témoigner de son expérience pour sensibiliser. « Je voulais expliquer pourquoi un enfant peut être un élément perturbateur. Car personne ne va jamais lui poser la question de ce qui, lui, le perturbe. Or, des troubles du comportement induisent un traumatisme derrière. Ce roman, c’est d’abord un combat contre l’indifférence. » Selon une enquête Ipsos pour l’association internationale des victimes de l’inceste (AIVI), un Français sur quatre connaîtrait une victime dans son entourage. Mais difficile de briser le silence, l’inceste est un secret bien gardé. « Si la parole de l’enfant se libère, elle explose la cellule familiale. Et quand, dans votre vie, vous n’avez que votre famille… L’enfant fait forcément le choix de la loyauté envers celle-ci. Avoir cette pensée, c’est une mort psychique d’une violence extrême. »
Libérer la parole n’est qu’une étape. La reconstruction à suivre en est une autre, pas moins difficile à franchir. « Je pense qu’on ne peut jamais réparer totalement ce genre de crime, au moins apprendre à vivre avec, être dans une forme de résilience, pense Chantal Blanc. Cela dépend de beaucoup de facteurs : du psychologue, du juge des enfants, des éducateurs… Il faut une cohérence sociale autour de l’enfant. Mais il y a souvent des chapelles, alors qu’il faudrait laisser tomber les corporatismes. » Lorsqu’ils ont lieu, les retours dans la famille sont compliqués. Aussi, beaucoup de victimes finissent à la rue à leur majorité. 40% des jeunes sans domicile fixe sortent effectivement de l’Ase.
En France, quatre millions de personnes seraient victimes d’un « viol en famille ». « Il touche toutes les classes sociales. Et l’omerta est encore plus grande dans les milieux bourgeois. » Contrairement aux idées reçues, l’inceste n’a été que très récemment intégré au Code pénal, par une loi de 2015. Il était jusqu’alors seulement reconnu comme une circonstance aggravante de crimes ou délits sexuels contre un mineur.
Un été à la campagne de Chantal Blanc, aux éditions du Panthéon. Séance de dédicaces samedi au Super U de La Roche-Posay.
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