Ils déclarent la guerre aux frelons

Alors que les apiculteurs de la Vienne sonnent l’alerte face à la menace du frelon asiatique, des étudiants poitevins en génie cellulaire planchent sur un piège biologique spécifique à ce nuisible.

Romain Mudrak

Le7.info

« Nous voulons taper un grand coup ! » Le président des Apiculteurs du pays Châtelleraudais en a assez que le frelon asiatique décime ses abeilles en toute impunité. Et Philippe Merlier compte le faire savoir, le samedi 9 mars, devant le sous-préfet de Châtellerault, le député Nicolas Turquois, Alain Pichon, président de l’association des maires de la Vienne, et de nombreux élus du département. Il organise une réunion publique à Antran (Vienne) avec l’un des experts français de cet « envahisseur », l’entomologiste Eric Darrouzet. Une façon de sonner l’alerte générale et d’inciter les collectivités ainsi que l’Etat à prendre le problème à bras-le-corps. « Pourquoi certaines communes donnent des aides aux propriétaires qui veulent détruire un nid de frelons chez eux et pas d’autres, déplore l’intéressé. Pourquoi n’y a-t-il pas de politique nationale sur le sujet ? » La question reste posée.

L’invasion a commencé en 2005 par le sud-ouest de la France. Puis le frelon asiatique est progressivement remonté, dévastant toutes les ruches sur son passage. Depuis trois ans, la destruction des nids de frelons est même devenue l’activité principale, « entre juillet et novembre », de Christophe Chaumeau, spécialisé dans le traitement des nuisibles. L’été, il intervient « jusqu’à dix fois par jour » pour déloger ces insectes agressifs.

Molécule naturelle
Le problème, c’est que la panoplie de parades est relativement réduite. Les pièges utilisés par les apiculteurs causent la mort d’un grand nombre de mouches, bourdons, guêpes et même d’abeilles. Un comble. Ces dommages collatéraux sont insupportables aux yeux des amoureux de la nature. Et si la solution venait de... Poitiers ? Un groupe d’étudiants en deuxième année de master génie cellulaire tient une piste sérieuse pour mettre au point un produit hyper sélectif qui n’attirerait que les frelons asiatiques. « Nous voulons utiliser les molécules sécrétées naturellement par ces frelons pour communiquer entre eux », précise Anaïs Canteau. Cette méthode a d’ores et déjà été validée par Eric Darrouzet, le même qui sera à Antran le 9 mars. Mais là où les six jeunes Poitevins innovent vraiment, c’est dans leur capacité à reproduire cette molécule à l’infini. Pour cela, ils vont appliquer les principes (très prometteurs) de la biologie de synthèse. « En résumé, il s’agit de modifier des gènes de bactéries pour qu’elles produisent ce que l’on souhaite, comme des usines biologiques », explique Tony Horbach.

Supervisée par l’enseignante-chercheuse Brigitte Vannier, Anaïs, Tony et leurs camarades Anne-Claire Boisson, Marin Duthoit, Alicia Faugeroux et Marine Lavaud bénéficient pour leurs travaux du soutien de la Fondation de l’université de Poitiers. L’entreprise Valagro met à leur disposition un laboratoire dans lequel des tests débuteront en mars. Ils ont aussi lancé une cagnotte(*) pour finaliser le budget. Ensemble, ces étudiants comptent présenter leurs résultats à l’Igem, un concours international organisé par le Massachussetts institute of technology (MIT), fin octobre à Boston. En cas de victoire, l’avenir de leur startup serait déjà assuré.

(*)Plus d’infos sur la cagnotte : too-bee-hornet-too-bee.fr.

Photo de frelon => DR Darrouzet

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