Des cahiers de doléances à la marge

Crise des Gilets jaunes oblige, plusieurs mairies de la Vienne ont mis à disposition de leurs administrés des registres pour recueillir leurs doléances. Ils ne font pas recette, alors qu'un grand débat national s'ouvre aujourd'hui.

Arnault Varanne

Le7.info

« Arrêtez d’augmenter tout. Les Français moyens ne peuvent plus suivre. Avec 900€ par mois, on ne vit pas, on survit. » Nadia P., Chauvigny. « Monsieur Macron, il nous faut un plus sur notre retraite pour vivre mieux et être en bonne santé. » Martine R., Châtellerault. Le grand débat national n’a pas encore commencé que les citoyens s’expriment déjà, à l’écrit, via les cahiers de doléances mis en place dans plusieurs communes. Le 11 décembre, Chauvigny fut l’une des premières à mettre des registres à disposition de ses administrés. « J’ai vite senti le besoin de le faire, reconnaît Gérard Herbert, le maire. De par mon métier (médecin généraliste, ndlr), je suis tous les jours en contact avec des gens qui ont du mal à s’en sortir… » Comme ses collègues, l’édile fera « remonter à Madame la préfète » les demandes de ses concitoyens. Las… Une quinzaine de personnes seulement ont pris la plume pour consigner leurs propositions. Les autres ont jusqu’au 28 février pour s’y coller. Même constat à Châtellerault, où les Gilets jaunes sont pourtant très mobilisés depuis le 17 novembre. Seulement une trentaine d’habitants se sont exprimés depuis le 21 décembre. Essentiellement des retraités soucieux de leur pouvoir d’achat.

« Ce qui revient beaucoup, abonde Jean-Pierre Abelin, c’est le besoin de services publics, le retour de l’Impôt de solidarité sur la fortune ou le Référendum d’initiative citoyenne. Parmi les Gilets jaunes, il y a beaucoup de gens qui ont eu de gros problèmes dans leur vie professionnelle. La colère vient de loin, mais je pense que les 80km/h ont été un déclencheur et la hausse des taxes sur les carburants un détonateur. »

« Jouer le rôle de soupapes »

A Antran, fief du président de l’association des maires de la Vienne, le cahier de doléances est toujours vierge de tout commentaire. « Alors que nous avons quelques Gilets jaunes sur la commune », s’étonne Alain Pichon. L’expression écrite constituerait-elle un frein pour certains ? Sans doute. Ceux-là s’empareront plus facilement du grand débat national voulu par le Président de la République (*). En attendant de connaître les modalités pratiques et le calendrier précis, les maires du département ont le sentiment d’être « réhabilités » dans leur rôle de « premiers remparts de la République ». Comme leurs concitoyens, les élus de proximité avaient eux aussi le sentiment d’être déclassés. « Le terme est un peu fort, corrige Alain Pichon, mais nous sommes les premiers maillons de la chaîne, nous pouvons jouer ce rôle de soupapes. »

Au terme de soupape, le maire de Poitiers préfère celui de « facilitateur ». Alain Claeys n’a pas encore mis de cahiers de doléances à disposition des Poitevins -« ils posent le problème de l’anonymat »-, mais planche sur « une plateforme numérique ». « Nous participerons à ce débat, sans le récupérer bien évidemment… »


Grand débat national : Poitiers entre en jeu
Soucieux d’être un « facilitateur » dans le grand débat national qui s’ouvre aujourd’hui, Alain Claeys a demandé à ses équipes de mettre à disposition des Poitevins, dans toutes les mairies annexes, la lettre du Président de la République Emmanuel Macron. La liste des trente-quatre questions centrales du débat, réparties en quatre thèmes, sera également portée à la connaissance de tous ceux qui veulent exprimer leurs opinions. Au-delà, chacun aura la possibilité de contribuer en adressant une lettre à la mairie ou un courriel via l’adresse poitiersdebats@poitiers.fr. Une page dédiée est d’ores et déjà disponible sur les sites Internet poitiers.fr et grandpoitiers.fr. A signaler que la collectivité met également à disposition trois salles (Maison du peuple, salle Timbaud, salons de Blossac) pour la tenue de réunions publiques. Buxerolles fait de même avec la salle des Castors. Enfin, une plateforme citoyenne participative sera mise en place dans les prochains jours. "Je vais par ailleurs demander au Conseil de développement responsable de Grand Poitiers, ainsi qu'aux conseils citoyens, conseils, comités et maisons de quartier de prendre les initiatives qu'ils souhaitent", conclut Alain Claeys. Le grand débat national doit avoir lieu jusqu'au 15 mars. 

Emile Soumbo référent dans la Vienne
Secrétaire général de la préfecture de la Vienne, Emile Soumbo a été désigné référent départemental pour l'organisation des débats. Son  rôle consistera à organiser et faciliter lesdits débats. Toutes les informations pratiques relatives au grand débat national sont accessibles sur www.granddebat.fr. Une plateforme téléphonique, accessible du lundi au samedi de 9h à 20h, est également opérationnelle. Le numéro vert est le 0 800 97 11 11.

 

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