Dans son deuxième long-métrage, l’humoriste et réalisateur Kheiron pose un regard à la fois naïf et grave sur la société française, à travers le prisme d’anonymes sincères et attachants.
Des images d’une ville en guerre, quelque part au Moyen Orient. Au milieu des ruines et des chars, un enfant des rues à la démarche encore mal assurée, un petit anonyme comme tant d’autres, plongé malgré lui dans une violence crue. Kheiron pose le décor. Il avertit : le film qui va suivre semble léger, il ne l’est pas.
Sans transition, le réalisateur-scénariste-humoriste-rappeur projette le spectateur sous le ciel gris d’une banlieue parisienne, sur un parking d’hypermarché, à la rencontre d’un étrange duo campé par une Catherine Deneuve aux cheveux gris, Monique, et Waël, le jeune homme que Kheiron incarne avec simplicité.
« Monique, je t’adore mais t’es vieille. C’est pas grave ! » Entre les deux-là, la complicité n’a pas de frontière. Elle est dans les dialogues, les regards, les gestes. Elle flirte gentiment avec l’illégalité jusqu’à l’irruption de Victor, une ancienne connaissance de Monique, un homme foncièrement droit et bienveillant. Son combat : redonner à des ados paumés le goût de leur vie. Il enrôle dans cette aventure, à laquelle il semble être le seul à croire, Monique et Waël.
Volontaire désigné pour s’occuper de six adolescents plus vrais que nature, insolents et attachants, le jeune homme est plein de ressources, qu’il puise on ne sait où… Il va apprivoiser Nadia, Shana, Fabrice, Jimmy, Ludo et Karim, ces prétendues « mauvaises herbes » qui ne trouvent pas leur place au milieu des autres et au pied des immeubles. Ils sont au cœur de ce conte urbain et social dans lequel Kheiron distille -trop ?- généreusement, avec malice, les idées d’écoute, de tolérance et d’entraide, en s’appuyant sur une bande-son éclectique.
Doter les dialogues de La Petite Maison dans la prairie d’une portée philosophique, il fallait oser ! Kheiron joue et gagne, sans jamais plonger dans le sirupeux ou le pathos. Il déconstruit les clichés dans un mélange de naïveté et de gravité et réalise une comédie douce-amère, empreinte d’un optimisme œcuménique apaisant.