Hier
L’obligation, pour les grosses entreprises prodigues en dividendes, de verser une prime à leurs salariés, fait l’unanimité… contre elle. Pour une fois, syndicats et patronat militent dans le même sens. Mais ils ne s’appuient pas sur les mêmes arguments. Exemples à la CGT et au Medef.
Y’a pas à dire, il est fort ce gouvernement ! Parfois malhabile dans sa communication, mais rassembleur en diable. Son dernier tour de magie : réunir, dans une même opprobre populaire, le pot de terre et le pot de fer. Entendez les syndicats de salariés et le patronat.
Il y avait longtemps que les deux camps ne s’étaient ainsi fondus dans le même moule de la contestation. Avec « sa » « prime salariés » (voir en annexe), François Baroin a réussi l’improbable. Sauf que sur la gamme des revendications, les points de vue dissonent.
Du côté du Medef, ils se sont même apaisés, à la lumière des interventions de la ministre de l’Economie elle-même. « Instaurer une prime obligatoire, c’est laisser entendre que les dirigeants d’entreprises ne se comportent pas de manière responsable et équitable avec leur salariés, avait ainsi lancé Didier Georget, au lendemain des primes déclarations du ministre du Budget.
Pour le président du Medef Vienne, l’ingérence de l’Etat dans la vie des entreprises reste un « acte condamnable ». « Nous devons toutefois reconnaître que les précisions de Mme Lagarde nous ont quelque peu rassurés », estime-t-il aujourd’hui.
Le projet s’est certes assoupli. En s’appuyant notamment sur la promesse d’initier un mécanisme d’exonération de charges sociales pour le paiement de primes exceptionnelles aux salariés. « Très bien, soutient Didier Georget. Mais pourquoi lier ces belles paroles au versement de dividendes ? Ça n’a rien à voir. »
« Et notre pouvoir d’achat ? »
Les derniers effets de manche de François Baroin n’ont, au fond, pas changé grand-chose à l’affaire. Si le montant de la prime, de 1000 € au départ, devient négociable, si cette prime reste facultative pour les sociétés de moins de 50 salariés (plus de 90% du tissu entrepreneurial de la Vienne), le projet tord toujours le cou à « la liberté d’entreprendre », comme le clame la patronne nationale du Medef, Laurence Parisot. « Et à ce que je sache, étaie Didier Georget, la négociation avec les partenaires sociaux fait déjà partie des obligations d’une entreprise. Je ne vois pas ce que tout ce brouhaha va apporter de nouveau. »
Entre améliorations de forme et suspicion de fond, le patronat navigue donc à vue. Pour la CGT, en revanche, c’est une opposition linéaire et dure. « On n’en veut pas de cette prime, pérore le secrétaire de l’Union départementale, Bernard Viot. C’est de la poudre aux yeux, une illusion. Ce n’est pas ça qui fera augmenter les salaires. »
Le militant poitevin n’hésite pas à appuyer là où ça fait mal. « Rien, dans ce dispositif, ne concerne les cotisations sociales et le financement du régime des retraites, peste-t-il. La CGT refusera de participer à de quelconques négociations. Car tout ceci n’est que démagogie. » Et Bernard Viot d’enfoncer le clou : « Les syndicats patronaux ont beau jeu de s’indigner. Eux, ce qu’ils remettent en cause, c’est leurs charges et l’interventionnisme de l’Etat. Nous, c’est notre pouvoir d’achat. Nos raisons de contester le projet ne sont franchement pas les mêmes. »
Eh oui, nous nous serions finalement trompés ! Le pot de fer et le pot de terre ne sont toujours pas fabriqués dans le même moule.
Une prime pour qui ?
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lundi 23 décembre