Aujourd'hui
Concepteur coiffeur de renommée internationale, le Poitevin Jean-Marc Joubert possède une quinzaine de salons sur Paris et l’Arc Atlantique. L’autodidacte s’est fait un nom.
Tenter de lui donner un âge est peine perdue. “On s’en fout, ce qui compte, c’est de vivre avec son temps.” Et d’aimer passionnément ce pour quoi on se lève tous les matins.
Le bonheur des rencontres. Le piment de la découverte. Le nanan de l’innovation. Jean-Marc Joubert n’a pas d’âge. Car son existence n’a jusque-là cessé de balayer les tourments du passé pour mieux conquérir l’avenir. Cette adéquation entre les vérités de l’existant et sa propre évolution personnelle est un fil rouge incandescent. Que seules la maladie ou la mort pourraient un jour rompre. “Quand on arrête, dans ce métier, on n’existe plus.”
Le petit bonhomme est un grand de ce monde. Un artiste-né très tôt immergé dans l’univers du piano, de la batterie et de l’accordéon, compagnons de son adolescence, mais tout aussi vite rattrapé par les démons de l’autosuffisance alimentaire. “A ma sortie de l’école de musique de la rue de la Tête Noire, à Poitiers, j’ai voulu vivre de ma passion sur la capitale. J’ai rapidement déchanté.”
“La coiffure, une profession trop souvent dévalorisée”
De cabarets en mini-concerts, le gamin de la France d’enbas, fils d’une employée de mairie et d’un professionnel de l’automobile, se brûla les ailes au feu de l’errance. Jusqu’au jour… “Jusqu’au jour où j’eus la chance d’assister à une prestation extraordinaire de haute coiffure française au palais des congrès de Paris.”
Plus qu’un déclic, une révélation. “Je me suis dit que ce genre de spectacle-là, avec musique, lumières et jolies filles, serait à ma portée. Oui, c’était pour moi.”
Le principe selon lequel “il ne faut jamais rien attendre des autres” fut son moteur. Le jeune Joubert se lança donc dans le vide. Deux tests en salon, une formation en école, un CAP et un brevet professionnel en poche, le gaillard réussit son premier pari. Son premier Paris. “J’ai bientôt pris la direction d’un salon à Vincennes puis ai commencé à travailler sur la mise au point d’une nouvelle méthode de coupe.” Une méthode visant à éliminer les gestes inutiles, à optimiser les positions du corps, à mieux redessiner la géométrie de l’espace, à épurer le dialogue avec le client. “J’ai alors compris que les démarches artistiques et productivistes n’étaient pas incompatibles.”
Depuis un quart de siècle, Joubert est couvé par les plus grands : Schwarzkopf, pour qui il travailla pendant dix ans en freelance, mais aussi et surtout L’Oréal, dont il est aujourd’hui l’un des ambassadeurs à travers la planète. De Poitiers, où il ouvrit son premier salon, rue du Marché, en 1986, à Tokyo, New York ou Moscou, de shows high-tech en films didactiques, l’enfant de la Vienne défend l’image d’une coiffure à la française, originale, prospective, définitivement relookée aux couleurs du modernisme. “Une coiffure qui rend ses lettres de noblesse à une profession trop souvent dévalorisée.”
Un homme sans âge qui vit avec son temps
A ce jour, “JMJ” préside aux destinées d’une centaine d’employés et d’une quinzaine de salons. Dont quatre à Poitiers, rues du Marché et Carnot sous l’enseigne “Jean-Marc Joubert”, dans les centres Leclerc et Géant Casino, sous l’estampille “Arthur et Axel”, prénoms de ses deux fils de 19 et 15 ans. Son centre de formation, ouvert en 1999, a quant à lui déménagé, en 2005, vers Paris, rue du Louvre, où le coiffeur a acquis un ensemble de 550 m2. Trois autres salons, rue Saint-Honoré, rue Montorgueil et à Saint-Germain- des-Prés, fréquentés par une clientèle internationale, entretiennent désormais le mythe. Un mythe figé dans la conviction que la coiffure doit s’imprégner des lieux qu’elle habite. “Mes salons, assure-t-il, sont tous différents, car authentiques, en totale osmose avec les quartiers dans lesquels ils sont implantés.”
Le globe-trotter Joubert regarde encore et toujours vers demain. Vers la création de nouveaux produits dérivés. Vers l’ouverture imminente de deux nouveaux magasins à La Rochefoucauld et La Rochesur-Yon. Vers une plus grande exposition nationale. Et même vers le Brésil, où son premier salon “étranger” devrait prochainement s’établir. L’homme n’a pas d’âge. Mais il vit avec son temps. Et l’espace du monde. “Est-ce que j’ai réussi ? Je ne sais pas. Et je m’en fiche.” Le chemin parcouru l’intéresse moins que les sillons à tracer. Tout juste se satisfait-il de s’être entouré de collaborateurs “compétents, autonomes et authentiques”. “Ma vie, sans eux, sans l’humain, sans l’échange, ne serait finalement pas grand-chose.” Si la coiffure est un art, elle est avant tout celui du partage.
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