Hier
Sylvette Rougier, 56 ans. Ancienne infirmière au CHU de Poitiers et militante active de la cause palestinienne. Physique fluet mais détermination sans faille. Portrait.
Elle reçoit au centre socioculturel de Beaulieu, sur terrain neutre. Une table, deux chaises et nous voilà embarqués à des milliers de kilomètres de la tranquillité poitevine. Les horreurs du conflit israélo-palestinien, Sylvette Rougier connaît par coeur. Vingt ans d’activisme associatif, de soutien à la “cause” palestinienne et une dizaine de voyages ont
forgé ses certitudes. “Le militantisme, une fois qu’on a mis les pieds dedans, c’est difficile d’en sortir, admet la présidente du comité poitevin France- Palestine. Lorsque des choses nous révoltent, on est obligé de les dénoncer !” “Informer et dénoncer.” Les deux moteurs de son existence associative. Désormais loin des salles de cardiologie, l’infirmière en retraite y consacre une bonne part de son temps libre.
Initialement, rien ne la prédisposait à sortir du rang de cette manière, à faire irruption dans les entrailles d’une guerre larvée dont elle ignorait tout jusqu’au début des années 80. Plutôt discrète mais affable, l’enfant du Sud- Vienne s’est en réalité éveillée à la “chose politique” dans les années 70. “J’étais à l’école d’infirmières, à Poitiers. J’avais 20 ans et Pinochet venait de faire son coup d’Etat au Chili. Je me souviens des manifestations, de la collecte au drapeau…”
“Rendre service aux gens”
Fille d’un soldat emprisonné pendant la Seconde Guerre mondiale, Sylvette honnit les conflits armés. Logique. “Mon père m’a souvent répété que la guerre lui avait volé quatre ans de sa jeunesse…” Message reçu cinq sur cinq. À l’engagement humanitaire en milieux hostiles, la jeune femme préféra donc une carrière d’infirmière de proximité pour “rendre service aux gens”. Chaque retour sur le théâtre de ses “amours” professionnels lui met aujourd’hui “une boule au ventre”. On n’efface pas trente-sept années de services irréprochables d’un trait de plume.
Oui, Sylvette Rougier est du genre fidèle. À son métier. À son mari. À ses convictions. Et pourtant, comment ne pas se décourager devant l’ampleur du “problème” israélo-palestinien ? “Les appels que nous lançons s’appuient sur ce qui est positif dans l’être humain : sa compassion, son humanité, sa solidarité, son désir d’un monde pacifié. À travers mes témoignages, j’essaie de faire en sorte que la force laisse place au droit. L’action nous empêche tous de subir le cours
des choses.”
A l’émotion
À l’heure où les yeux du monde sont braqués sur Haïti, le Proche-Orient paraît d’un coup loin, très loin, relayé au rang de fil rouge de l’actualité internationale. C’est un fait, les démocraties occidentales fonctionnent à l’émotion. Sylvette aussi. Mais elle ne se résout pas au statu quo et va au-delà de l’instantanéité des choses. Le blocus de Gaza ? Les enfants morts pendant la seconde Intifada ? L’or bleu très mal partagé ? Les brimades du quotidien ?… En militante active, elle dénonce encore et toujours ces “horreurs”.
Et après ? La présidente du comité poitevin et sa soixantaine de compagnons semblent aujourd’hui prêcher dans un désert d’indifférence. L’histoire leur donnera peut-être raison. En attendant, l’ex-infirmière se fait fort d’administrer dès qu’elle en a l’occasion une piqûre de rappel à l’opinion publique. Fermez le ban.
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jeudi 21 novembre