La paille hachée, défauts et qualités

Ielo, dont le site de production est à Bonneuil-Matours, veut développer le marché de la paille hachée comme isolant biosourcé. La société coopérative a fait appel à une jeune chercheuse, Maria Mustafa.

Claire Brugier

Le7.info

En juin 2021, la toute jeune Scic Ielo se préparait à recevoir sa ligne de production, à Bonneuil-Matours. Son ambition : valoriser la production agricole locale en développant la filière de la paille de blé hachée comme isolant. Un an après, la Société coopérative d’intérêt collectif, dont le siège est à Limoges, a obtenu sa première Appréciation technique d’expérimentation (Atex) et le bâtiment Champlain, sur le campus de Poitiers, est devenu son premier chantier pilote. Désormais, Ielo, qui a produit et commercialisé 430 tonnes de paille hachée en 2024, en partenariat avec la coopérative de La Tricherie, veut « pousser plus loin le curseur », en quantité -objectif 4 000 tonnes en 2025- et en qualité, en diversifiant les usages de son matériau biosourcé.

A ce jour, la paille de blé hachée commercialisée par l’entreprise coopérative est insufflée en vrac dans des parois et façades verticales. Mais la Scic aspire à la voir investir « les combles, la toiture, les planchers bas et hauts, ou les murs pour d’autres usages », énumère son directeur Nicolas Rabuel. Pour y parvenir, elle s’est attachée depuis septembre les compétences d’une jeune thésarde, Maria Mustafa. « Il faut que l’on puisse rassurer, anticiper, prévenir de quelle manière la paille va se comporter face à certains désordres liés à la température et à l’humidité », explique Nicolas Rabuel. Charge à la jeune chercheuse libanaise, depuis le site rouennais du laboratoire UniLaSalle, de mettre à l’épreuve ce matériau végétal à travers une thèse intitulée « Résilience, résistance fongique et performance hygrothermique de la paille de blé hachée ».

« Un rôle de filière »

« Le secteur du bâtiment en France génère 123 millions de tonnes de CO2 et consomme 40% de l’énergie totale. Avec une production annuelle de 764 millions de tonnes, le blé se positionne au troisième rang des cultures les plus produites, rappelle Maria afin de poser le contexte de ses recherches. Seulement 10% de la paille produite suffirait à isoler toutes les nouvelles habitations en paille. » Encore faut-il bien la connaître, en étudiant sa capacité à résister aux variations environnementales et aux attaques fongiques, en évaluant ses propriétés hygrothermiques, en déterminant les risques d’aérosolisation et de propagation des contaminants fongiques… Première étape : « caractériser différents lots de paille produits par Ielo », 
explique la chercheuse, « afin de démontrer que, peu importe la paille qu’on utilise, le produit reste conforme à ses promesses de durabilité », complète Nicolas Rabuel. Les lots de paille seront livrés à Rouen courant janvier. « A partir des recherches de Maria, on pourra distinguer des bonnes pratiques et faire des préconisations en matière de semis, de choix des parcelles et de variétés, de qualité de stockage…, note le directeur de Ielo. En tant qu’entreprise de l‘économie sociale et solidaire, nous menons une démarche alternative aux fabricants classiques, avec un rôle de filière. La thèse de Maria a vocation à nourrir notre cadre éthique. Notre but n’est pas d’enrichir des actionnaires. »

À lire aussi ...