Musique et cerveau, l’accord parfait

Pour leurs 10 ans, les Moments musicaux, dispositif destiné aux malades d’Alzheimer et à leurs aidants, ont souhaité mettre en lumière les bienfaits de la musique sur le cerveau. Au micro : Emmanuel Bigand, professeur de psychologie cognitive.

Claire Brugier

Le7.info

Plus de dix ans déjà se sont écoulés depuis que le 
Dr Isabelle Migeon-Duballet a assisté à une conférence sur le thème « Musique et mémoire », 
à Paris. Au micro ce jour-là : 
Hervé Platel. Les mots du neuropsychologue, parmi les premiers à avoir étudié l’activité du cerveau lors d’une écoute ou d’une pratique musicale, ont trouvé un écho tout particulier chez la gériatre poitevine. Peu après sont nés les Moments musicaux, un parcours destiné à sortir de l’isolement les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et leurs aidants. Portés par le pôle gériatrie du CHU, ils ont aussitôt bénéficié de la complicité de l’Orchestre de chambre Nouvelle-Aquitaine (Ocna) et du Théâtre-auditorium de Poitiers (Tap) pour proposer des ateliers de résonance corporelle et des concerts, à la médiathèque et au Tap. « En Ehpad, j’ai vu une dame pianiste et qui présentait un Alzheimer évolué se mettre à rejouer des morceaux compliqués ! », témoigne le Dr Migeon-Duballet.

Pour leurs 10 ans, fin novembre, et alors que la gériatre s’apprête à quitter Poitiers pour Toulouse, les Moments musicaux ont confié le micro à Emmanuel Bigand, au Tap. Le professeur de psychologie cognitive à l’Institut universitaire de France, rattaché au laboratoire CNRS Lead de l’université de Bourgogne, n’est toutefois pas intervenu seul. Pour évoquer les effets de la musique sur le cerveau, il s’est fait accompagner par trois musiciens de l’Ocna. La preuve par la musique en somme !

Musique et langage, même combat !

« Que se passe-t-il dans le cerveau quand on écoute de la musique ? La membrane basilaire qui code le son dans l’oreille le prend et le découpe. » Résultat : le cerveau se retrouve avec un son éclaté qu’il doit reconstruire. « Pour cela, il doit apprendre à séparer les notes de bruits, analyser les intervalles de hauteur, identifier les mélodies… » Il mobilise le tronc cérébral mais aussi les cortex auditifs, les voies ventrales et dorsales, les voies motrices, et même le cerveau émotionnel. « Quand on est engagé dans la musique, tout le cerveau fonctionne, souligne Emmanuel Bigand. Elle favorise la plasticité cérébrale et, on le voit à l’IRM, elle mobilise les mêmes zones que le langage. » 
Qui plus est, « comme la nourriture ou la reproduction, la musique active les circuits de la récompense qui produisent de la dopamine ».

Des recherches récentes n’ont fait que conforter les effets bénéfiques de la musique sur le cerveau, et à tous âges. « Il y a deux ans, un laboratoire de Genève a montré que faire écouter de la musique 3 fois 8 minutes par jour à un grand prématuré aidait à la maturation de son cerveau !, s’enthousiasme Emmanuel Bigand. Et la musique a aussi un pouvoir transformationnel sur le cerveau. Par exemple, le corps caleux (ndlr, commissure qui interconnecte les deux hémisphères) est plus large chez un musicien. Même un apprentissage tardif rajeunit les fonctions exécutives du cerveau. » Et le spécialiste de conclure : « La musique est un vecteur de la plasticité cérébrale au service de la santé et de l’éducation. » Il serait donc dommage de s’en priver !

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