Hier
Dans son premier long-métrage, Simon Bouisson fait se confronter deux personnages, Emilie, une jeune étudiante de chair et de sang mal à l’aise dans la vraie vie, et un drone de verre et de métal particulièrement intrusif. Résultat : un thriller inquiétant et bien construit.
Magnifiques ces images nocturnes de Paris illuminée… Enfin jusqu’à ce que la caméra s’attarde devant des fenêtres éclairées d’immeubles, obligeant le spectateur à entrer dans l’intimité des appartements. Déjà le malaise affleure. Quelques images a priori anodines ont suffi à planter le décor de Drone, le premier long-métrage de Simon Bouisson. Ne reste plus qu’à faire connaissance avec Emilie, une étudiante en architecture fraîchement débarquée à Paris. Sa bourse lui ayant été refusée, elle jongle entre ses études et une activité de cam girl, plus à l’aise derrière un écran que dans une réalité où elle peine à trouver sa place. Une nuit, elle remarque qu’un drone l’observe par la fenêtre de son appartement. Entre l’engin volant non identifié et la jeune femme, il y a la vitre pleine des reflets des lumières de Paris, sorte de frontière entre deux mondes, le réel et le virtuel. Ce drone intrusif est-il bienveillant ou maléfique ? Ami ou ennemi ? Homme ou une pure intelligence artificielle ? Emilie doute, essayant tantôt de le fuir, tantôt de l’apprivoiser, au point qu’il lui devient presque familier.
Révélée par Cédric Klapisch dans En corps, Marion Barbeau incarne avec sensibilité les errements de la jeune femme. L’ancienne danseuse étoile est de tous les plans ou presque de ce film étrangement silencieux. La bande-son, discrète et très urbaine, se cale sur son souffle et sur ses silences pour ajouter à une tension palpable, inscrite dans les ombres de la nuit parisienne et dans cette usine désaffectée qu’Emilie ne craint pas d’explorer seule. « Ce qu’on ne voit pas de ses propres yeux n’existe pas », fait dire à l’un de ses personnages le réalisateur qui interroge pendant presque deux heures les limites de cette affirmation, ses dangers aussi. Où commence et où s’arrête le voyeurisme ? Telle est la question. Quant au « spectateur » dans tout ça, il est précisément « celui qui observe »…
Thriller, de Simon Bouisson, avec Marion Barbeau, Eugénie Derouand, Cédric Kahn (1h50).
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