Aujourd'hui
Jacqueline Costa-Lascoux sera l’invitée des 20 ans de la Mission locale de Poitiers. Directrice de recherche au CNRS, elle animera le lundi 7 juin (11h15) un débat intitulé « Les jeunes, entre humiliation et résilience ».
Quel traitement la société française réserve-t-elle à ses jeunes ?
« Le regard de la société sur les jeunes est ambivalent. Au premier âge de la vie, l’enfant est roi. On lui demande ce qu’il veut manger, on le couvre de cadeaux. Il est la cible des publicitaires. Les adolescents peuvent s’habiller comme des adultes et avoir des relations sexuelles, mais ils ne peuvent prétendre à un emploi stable qu’autour de 30 ans. On ne les aide pas à obtenir leur indépendance financière. L’âge moyen du départ du foyer est de 26 ans, et on leur fait le coup de l’autonomie à 4 ans, c’est indécent. »
Pourquoi parlez-vous d’humiliation ?
« Les inégalités sociales se sont accentuées. On exploite les jeunes par l’intérim. Plus globalement, ils n’ont pas le pouvoir de construire la société de demain, ils n’existent pas. On porte atteinte à leur dignité, ce qui explique en partie leur violence. Les intellectuels les victimisent sur le thème de la fatalité. Moi, je considère qu’il faut leur proposer des solutions si l’on veut éviter l’émeute. Les jeunes sont lucides. Les apéros Facebook constituent la première forme de rassemblement improvisé, qui affole les préfets. D’autres mouvements non encadrés par les syndicats pourraient apparaître. Jusqu’où iront-ils ? »
Quelles sont ces solutions ?
« Des expériences microlocales, menées par des associations, voient le jour. Les partis politiques et les syndicats en sont exclus. Elles ne cherchent pas à changer le monde mais améliorent la vie là où elles existent. Le succès actuel du service civique montre que les jeunes veulent transformer profondément leur vie en s’engageant et en apprenant à vivre ensemble. C’est une seconde chance. Ils recherchent une vocation. Pourquoi ne les a-t-on pas mieux orientés ? Les enseignants devraient leur donner envie d’entreprendre plus tôt. »
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