Annoncée la semaine dernière, la revalorisation des salaires des fonctionnaires suscite le débat, particulièrement dans l’Education nationale où certaines augmentations sont conditionnées à de nouvelles missions.
L’annonce a été diversement appréciée. Face à la flambée des prix, le point d’indice des fonctionnaires sera revalorisé de 1,5% au 1er juillet, après une première hausse de 3,5% obtenue l’année dernière. La rémunération des agents gagnant moins de 3 250€ brut par mois sera accompagnée d’une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat de 300 à 800€ brut versée d’ici la fin de l’année. S’ajoutent d’autres mesures plus symboliques.
Le geste a le mérite d’exister. Reste qu’aux yeux des premiers concernés, ces annonces sont clairement insuffisantes pour compenser les près de 6% d’inflation. D’autant que tous les agents publics n’y auront pas forcément droit. Si ces avantages sont assurés pour les fonctionnaires d’Etat et hospitaliers, les « Territoriaux »
resteront soumis aux choix des collectivités. « Comme nos collègues de Châtellerault, nous allons demander cette revalorisation à la mairie de Poitiers mais nous savons aussi qu’elle ne sera pas facile à financer, admet Vincent Bohan, de la CGT Territoriaux de Poitiers. L’Etat rejette la responsabilité sur les collectivités sans leur donner les moyens. » Concernant le montant, il parle de « grosse déception », notamment pour
« les plus bas salaires, équivalents au Smic, qui ne vont gagner que 17 à 20€ de plus » et pour lesquels « les commissions de secours (aides d’urgence, ndlr) se multiplient à la mairie ».
« Ce n’est pas une revalorisation »
Du côté de l’Education nationale, la hausse du point d’indice est accompagnée de primes indemnitaires. Entre 224€ en début de carrière et 92€ par mois ensuite pour les enseignants, psychologues et conseillers principaux d’éducation dès septembre 2023, qu’ils soient titulaires ou contractuels. « Aucun professeur ne démarrera à moins de 2 000€ net par mois », assure la rectrice de l’académie de Poitiers, Bénédicte Robert. Les stagiaires, eux, seront augmentés de 160€ par mois. Les promotions hors classe et classe exceptionnelle arriveront aussi plus vite. A ce
« socle inconditionnel », viendront s’ajouter des mesures soumises à l’adhésion à un « pacte »,
autrement dit à la réalisation de missions supplémentaires. Lesquelles ? Effectuer des remplacements de courte durée, participer au soutien scolaire à travers le dispositif Devoirs faits ou aux stages de renforcement Vacances apprenantes... Chaque brique de mission sera valorisée 1 250€ brut par an, sauf en lycée professionnel où les enseignants, s’ils adhèrent au pacte, seront obligés de choisir d’office un pack de six briques de mission payé 7 500€ brut par an.
« On n’appelle pas cela une revalorisation, mais le retour du travailler plus pour gagner plus, regrette Julien Dupont, délégué du Snes-FSU 86. Le volume d’heures de certaines briques n’est pas quantifié. Dans le second degré, les enseignants seront sous astreinte pour remplacer au débotté leurs collègues absents. » Le syndicaliste déplore aussi
qu’« une partie de la somme ne compte pas pour la retraite », ce qui fait le lien avec le débat sur l’âge de départ à 64 ans.
« Quand les professeurs des écoles trouveront-ils le temps dans la semaine d’accomplir ces nouvelles missions ? », s’interroge Apolline Letowski, déléguée Snuipp-FSU pour le premier degré. Surtout dans la Vienne où ils sont majoritairement en classe le mercredi. Elle s’inquiète aussi du manque potentiel de volontaires dans les territoires ruraux. De quoi « renforcer les inégalités scolaires ». Une motion contre le
« pacte » circule dans les écoles. D’une manière générale, le bonus significatif apporté en début de carrière, unanimement reconnu, pourrait booster l’attractivité des métiers de l’enseignement qui en ont bien besoin. Reste à savoir si cela suffira à convaincre la nouvelle génération.
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