Aujourd'hui
Près de 700 ressortissants ukrainiens en exil ont été accueillis dans la Vienne depuis le 24 février 2022, date du début de la guerre. Un an après, quelques-uns sont repartis mais beaucoup sont restés, entre volonté d’intégration et espoir que le conflit cesse. Sans illusion...
Dans sa minuscule boutique de la rue Edouard-Grimaux, à Poitiers, Boghdan Sauveur ne chôme pas. Kit mains-libres « greffé » à l’oreille, le président d’Ukraine libre jongle entre son activité professionnelle -la réparation de téléphones et d’ordinateurs- et ses obligations associatives. Le téléphone chauffe en permanence. « Pas mal d’Ukrainiens nous appellent pour des problèmes administratifs, des demandes de logement. D’ailleurs, si vous pouviez dire qu’on manque d’appartements pas trop loin de Poitiers... » A sa connaissance, « une dizaine de familles ont quitté la Vienne pour repartir vers l’Allemagne ou la Pologne ». Beaucoup restent par obligation.
Depuis le déclenchement de la guerre, 695 Ukrainiens sont arrivés dans le département, 448 majeurs et 247 mineurs. Les chiffres de la préfecture de la Vienne ne bougent plus qu’à la marge depuis quelques semaines, ceux d’Audacia(*) avec. La structure s’est mobilisée dès mars 2022 pour organiser l’accueil des familles, principalement des femmes avec ou sans enfants, voire des personnes âgées. La guerre déclenchée par la Russie a jeté sur les routes quelque 7,5 millions de ressortissants, dont 66 000 ont migré vers la France. L’urgence de la mise à l’abri dans des logements collectifs (gymnases, résidences autonomie...) ou dans des familles poitevines a fait long feu. « On a ouvert dans un premier temps 400 places avec une mobilisation remarquable de nos salariés », observe Jean-Marc Jouve, directeur général d’Audacia. Ne restent aujourd’hui que dix places d’accueil d’urgence.
La difficile intégration
Du provisoire au durable, l’association a tôt fait d’activer une deuxième phase. « L’idée aujourd’hui, c’est que tout le monde aille vers des logements payants », commente Gwénaëlle Geffroy. L’opération est compliquée pour des raisons juridiques. Et la directrice du Pôle Migrant d’Audacia admet qu’il est « dur de trouver des appartements ». Il manque dix-sept studios/T1, six T2, douze T3, autant de T4, deux T5 et autant de T6 sur Poitiers, Grand Poitiers et Châtellerault. Pour pouvoir apprendre le français -53 personnes suivent des cours sur les 150 adultes accompagnés, 77 enfants sont par ailleurs scolarisés- et à plus forte raison travailler, la mobilité se révèle « essentielle ». Or, les familles sont réparties dans une trentaine de communes, dont certaines en milieu rural. Et sans parler la langue... Conséquence, seules 26 personnes ont une activité professionnelle (cf. page 4).
« L’autonomie est un sujet majeur, développe Gwenaëlle Geffroy. Dans l’esprit de beaucoup d’Ukrainiennes, on sent bien que le délai pour un éventuel retour s’est allongé. N’empêche qu’elles vivent la guerre au quotidien, sont dedans, participent au combat à leur manière. » Sans doute seront-elles nombreuses samedi, à 17h, place Leclerc, où se déroulera un énième rassemblement de soutien au peuple ukrainien. La veille, un autre rendez-vous est prévuv à 12h devant l'hôtel du Département. Le funeste 1er anniversaire est craint par Boghdan Sauveur, qui redoute « un coup d’éclat de Poutine, peut-être même avant le 24 ».
(*)Avec d’autres associations comme La Croix-Rouge.
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