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Non, l’ultramarathon n’est pas un sport extrême
Catégories : Sport, Regards Date : mercredi 22 décembre 2021Le Regard de la semaine est signé Joan Roch.
Pour une raison que j’ignore, la pratique des ultramarathons est souvent qualifiée de sport extrême. Comme si courir pendant quelques centaines de kilomètres dans les montagnes était l’apanage d’une poignée de têtes brûlées en mal de sensations fortes. Il faudra qu’on m’explique. En attendant, je vais vous livrer mon point de vue sur le sujet, en tant que membre de cette tribu d’illuminés.
Déjà, je vous rappelle que ce sont les sédentaires qui sont malades. Littéralement. Ne pas bouger est mortel, les statistiques le prouvent et la tendance empire. Nous autres, coureurs, ne faisons que suivre les recommandations maintes fois répétées et nous bougeons, courons, suons sur une base régulière, rien de plus.
Oh, je vous entends déjà protester. Entre courir un peu autour de chez soi et traverser des îles volcaniques en diagonale, il y a une différence. Certes, mais pensez-vous vraiment que ces Fous ont franchi la porte de leur logis pour se lancer directement sur les sentiers les plus sauvages de la planète ? Bien sûr que non. Prendre le départ d’une telle épreuve est le résultat de plusieurs années d’une progression lente pendant laquelle le corps s’adapte, l’esprit se conditionne et, surtout, surtout (!), la notion de ce qui est « normal » se transforme.
C’est dans cette redéfinition de la normalité que se trouve la clé. On commence par courir parfois, puis un peu, ensuite souvent, au gré du corps qui répond à l’appel. D’une année à l’autre, les records personnels deviennent des entraînements comme les autres. Et le schisme entre les sédentaires et les mobiles devient béant. En moins d’une décennie, le même coureur qui peinait à faire le tour de son quartier envisage désormais très raisonnablement de faire le tour du sommet de l’Europe.
Comment ? Qu’entends-je ? Ah oui, nous n’avons plus de vie sociale, on court tout le temps, c’est une addiction ! On voudrait le croire, mais parlons chiffres. Disons que dans ma dérive sportive délétère, je cours tous les jours. Un peu plus d’une heure. Soit une dizaine d’heures par semaine, 10 heures sur 168. Je consacre donc un maigre 6% de mon temps à bouger selon une routine bien intégrée. Le reste, soit 94% du temps, je dors, je travaille, je cuisine, je socialise. Comme vous, il me semble. Terminons par un aveu : c’est cette routine qui est l’objectif à atteindre, pas de franchir des cols à force de jambes. Car les récompenses sont innombrables pour le corps comme l’esprit. C’est anthropologique.
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