Jean-Pierre Raffarin : « Le leadership est une nécessité »

L’ancien Premier ministre et sénateur de la Vienne Jean-Pierre Raffarin vient de publier Choisir un chef, un livre dans lequel il évoque le leadership politique à travers l’histoire et d’un continent à l’autre.

Pourquoi ce livre ?
« C’est d’abord le fruit d’un cours donné depuis quinze ans à l’ESC Paris, ainsi qu’en Amérique du Nord, en Chine et en Afrique. J’avais envie de réfléchir à cette question du pouvoir en fonction des aptitudes demandées aux leaders sur différents continents. »

Comment expliquez-vous cette défiance grandissante à l’endroit des politiques, à quatre mois de la Présidentielle ?
« Il y a aujourd’hui dans notre société des problèmes d’adhésion aux différentes formes d’exercice du pouvoir. Emmanuel Macron, dans sa gestion de la crise sanitaire, a mobilisé une partie très importante des Français, ce qui l’a conduit à être l’un des présidents les plus populaires à quatre mois de la Présidentielle. En même temps, il existe des foyers d’opposition très radicaux, ce qui crispe les débats. » 


La gauche semble divisée, l’extrême-droite écartelée entre Marine Le Pen et Eric Zemmour, la droite en quête de leadership... Est-ce un boulevard pour le président sortant ?
« Je crois qu’Emmanuel Macron sera difficile à battre, il est à la fois le plus jeune et le plus expérimenté. Ça vous donne une certaine force. Il a géré la crise dans des conditions difficiles, il est donc favori. Mais pour sa famille politique, les Législatives ne sont pas gagnées d’avance. La situation politique du printemps 2022 reste très incertaine. »

Le pouvoir peut-il et doit-il continuer à s’exercer de manière aussi verticale ?
« Je pense que le leadership est une nécessité. Les sujets, notamment politiques, sont particulièrement complexes. Il est donc nécessaire de les incarner pour que l’opinion publique ait une lisibilité des situations. L’incarnation permet à une personne de représenter collectivement une diversité. Le leadership est à la fois nécessaire, mais il n’est pas toujours accepté et souvent irritant. »

Les élites sont-elles en danger, à l’image de ce qu’a montré le mouvement des Gilets jaunes ?
« Il y a des risques graves dans nos sociétés parce que la politique manque de légitimité. Cela concerne tous les pays du monde. La politique a été inventée pour lutter contre la violence en choisissant des règles qui nous permettent de vivre en paix. Or, ces règles ne sont pas toujours perçues comme légitimes. »

Les vrais leaders ou chefs 
ne sont-ils pas les dirigeants des Gafam ?
« Ce sont des leaders, même si avec la pandémie leur position a reculé, alors que celle des Etats a progressé. Chaque pays a fait face à la pandémie de manière spécifique. La plus forte décision politique des dernières années, c’est le couvre-feu. Tout notre problème, au fond, c’est de veiller à ce que notre démocratie soit vivante. Quand les Français sont mécontents, leur tendance est de s’abstenir. Les Américains, eux, sont allés voter en masse. La participation électorale est la vie de la démocratie. Il faut trouver des idées neuves pour la relancer. »

Lesquelles ?
« On ne va pas changer les Français, il faut donc changer la politique. Des élections à mi-mandat seraient plus utiles et permettraient de renforcer la légitimité du Parlement. Avec les réseaux sociaux et les chaînes d’info en continu, on est en démocratie permanente. On ne peut pas raccourcir le mandat présidentiel, cette formule permettrait de forcer le président à agir vite dans les deux années qui suivent son élection. »


Jean-Pierre Raffarin dédicacera Choisir un chef, les secrets du leadership du pouvoir, lundi 13 décembre, au Plaza Futuroscope, à Chasseneuil, à partir de 18h30. Editions Michel Lafond - 317 pages - 19,95€.