Aux premières loges des tensions de recrutement, les cabinets spécialisés constatent que la crise sanitaire n’a fait qu’accentuer un phénomène aux causes plus sociétales qu’économiques.
Face aux tensions de recrutement qui affectent actuellement le monde économique, les cabinets spécialisés dressent un même constat : quelque chose a changé dans la représentation du travail. « Il y a un avant et un après Covid, tranche Anne-Sophie Fillatreau, consultante chez Actiforces. Aujourd’hui, les priorités des candidats ont évolué. » Ces derniers ont d’autres attentes, tandis que les entreprises campent parfois sur les leurs.
« L’aspect rémunération n’est plus prioritaire. Les candidats cherchent du sens dans la fiche de poste et les missions qui leur sont confiées, reprend-elle. On a aussi de plus en plus de questions sur les horaires, le télétravail. Les candidats recherchent de la flexibilité. » Ils se révèlent aussi plus regardants sur l’équilibre vie-professionnelle-vie privée. « On n’est plus dans une course effrénée à la réussite professionnelle. Ce qui compte, ce sont les relations humaines au sein de l’entreprise, l’ambiance de travail », remarque de son côté Véronique Caillaud, responsable d’Horea Conseil.
Les critères ont changé, les comportements aussi. « Les candidats sont plus attentistes, souligne Anne-Sophie Fillatreau. Ils sont à l’écoute sur les réseaux sociaux mais ils attendent d’être contactés par les recruteurs. Ainsi, depuis le début de l’année, nous avons très peu de retours des annonces et davantage de résultats en faisant du sourcing sur les réseaux sociaux et les candidathèques. »
Travailler l’intégration
La séduction a donc changé de camp. Il appartient désormais aux entreprises de mettre en avant leurs qualités. « Il y a tellement d’annonces… Il faut se différencier et communiquer. Mais en restant vrai ! », prévient Karine Billaud, de Kaphisto RH, en dénonçant « des annonces fun ». D’autant que les réseaux sociaux ont vite fait de révéler ce que l’entreprise ne dit pas.
« Il est primordial pour les entreprises de travailler leur attractivité, en mettant par exemple en avant des avantages sociaux autres que financiers, conseille Anne-Sophie Fillatreau. Et aussi de travailler sur l’intégration du collaborateur, de lui donner l’occasion de s’exprimer… » Au risque de le voir quitter sa fonction pendant sa période d’essai.
Quant aux entreprises qui écartent certains candidats ne présentant pas tous les prérequis, « le candidat idéal n’existe pas, répond la professionnelle. Les softkills sont aussi importants que les compétences techniques. Surtout, il ne faut pas se couper de profils atypiques. »
A défaut de trouver en externe, ou peut-être encouragées par la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), les entreprises cherchent de plus en plus parmi leurs collaborateurs. « Nous sommes sollicités pour des évaluations (tests de personnalité, jeux de rôle), constate Anne-Sophie Fillatreau. Cela représente désormais près de 30% de notre activité. »