Les scènes mobiles, parades à la crise

Avec la fermeture prolongée des salles de concert et la suspension des festivals, des artistes du Poitou ont imaginé des scènes nomades. Une opportunité pour eux de continuer à faire de la musique, mais aussi d’amener la culture dans les villages.

Steve Henot

Le7.info

En 2014 déjà, il avait fait le pari de la mobilité en créant une caravane-scène, avec son collectif Virgule Prod. Ces derniers mois, Cyril Maguy a décidé de pousser le concept un peu plus loin en aménageant un plateau nomade, en « one-man band », à l’arrière d’un vieux pick-up français. « C’est mon moyen de locomotion, confie l’artiste connu sous le nom de Vicious Steel. Le but, c’est d’aller proposer des concerts dans des endroits différents, là où on n’attend pas forcément la musique. »


En maison de retraite, sur un marché, dans un centre de loisirs… Vicious Steel aspire à un peu plus de proximité. « Ce n’est pas forcément lié à la crise, précise Cyril Maguy. Mais ça va être d’actu cet été. » L’initiative du musicien trouve un écho d’autant plus fort en cette période troublée. Equipé d’enceintes autonomes, le dispositif de Cyril est adapté aux très petites jauges, facilitant de fait la distanciation des spectateurs. Le projet a été plébiscité lors de sa campagne de crowdfunding, récoltant près du double de la somme demandée. Des communes de Bretagne et de Charente ont déjà sollicité sa venue, pas encore dans la Vienne. « Le projet plaît. »


« Aller vers les gens »

Audrey et les Faces B s’est aussi essayé à la scène mobile. En juin 2020, le groupe poitevin s’est produit en plusieurs lieux de Sèvres-Anxaumont sur une remorque véhiculée par… le tracteur d’Yves Debien, un agriculteur de la commune ! « On avait le même plateau que sur une scène classique, raconte Audrey Joumas, la chanteuse. On demandait aux habitants de nous préparer une rallonge pour nous brancher chez eux. » Et ainsi jouer au grand air.


Ce dispositif « test » avait été validé par mairie et préfecture, alors que les traditionnels concerts de la Fête de la musique n’avaient pu se tenir. Sa seule limite : le tracteur. « On a fait Sèvres-Anxaumont-Chauvigny, ça nous a semblé une éternité ! », sourit Audrey. Des communes avaient fait part de leur intérêt pour cette solution, qui reste à adapter. Sans suite pour le moment. Le retour aux affaires culturelles, désormais espéré pour la mi-mai, pourrait relancer la machine. « On l’a toujours dans un coin de notre tête. Il n’y a encore rien de préparé mais on a envie d’aller démarcher d’autres communes. »


Au-delà de la réponse ponctuelle au contexte, les artistes veulent saisir cette occasion de diffuser la culture dans les zones rurales, moins pourvues que les agglomérations. « Il faut que ça reste, milite Cyril. C’est bien de faire des salles, mais aussi d’aller vers les gens. » D’où le nom donné à son projet : « Pick me up », littéralement « Viens me chercher » en anglais. Pour Audrey, il s’agit aussi de retrouver du sens dans une période difficile. « Jouer devant une caméra, ça ne remplacera jamais de voir les gens te renvoyer le plaisir qu’ils ont à t’écouter. Je ne conçois pas mon métier à travers l’écran. »

DR - Facebook

À lire aussi ...