Le consommer-local à l'épreuve du temps

La rédaction consacre cette saison une série aux circuits courts, qui peuvent se transformer en courts-circuits. Alimentation, mobilité, consommation... Les initiatives de proximité se révèlent parfois couronnées de succès mais pas toujours. Premier volet sur les promesses de changement nées du confinement.

Claire Brugier

Le7.info

Les plateformes numériques, ventes à emporter, drives de producteurs et autres services de livraison à domicile sont autant d’outils qui ont permis de maintenir une consommation de proximité au cœur du confinement. Seul l’avenir dira s’ils n’étaient que des solutions d‘urgence ou les prémices d’un changement véritable d’habitudes.
Certains acteurs du territoire ont décidé de forcer la main du destin, à l’instar de Grand Châtellerault. La communauté d’agglomération a lancé une vaste campagne de promotion du consommer-local chez les producteurs, artisans et commerçants, à laquelle elle souhaite associer tout un chacun. Au-delà des panneaux 4x3m, elle met à disposition tout un kit d’ « ambassadeur » avec des visuels, une signature mail ou encore des affiches à imprimer. Et pour joindre l’action à la communication, la Ville de Châtellerault a octroyé deux bons d’achat de 20€ pour chaque enfant scolarisé, à utiliser dans les commerces de centre-ville, avec une durée de validité de deux mois. A La Librairie, les effets se sont rapidement fait sentir. « Cela permet à des gens d’entrer, d’acheter un livre, ce qui pour certaines personnes est potentiellement intimidant. Cela permet d’ouvrir la porte », constate avec satisfaction la gérante Catherine Guenser. Carine Heligouin salue également l’initiative. Même si, selon elle, « cela fait un moment que les gens reviennent aux circuits courts », la trésorière de L’Echoppe des créateurs concède néanmoins que « la Covid a accentué la tendance ».

Le Web, allié du local

La consommation par temps de crise s’est largement appuyée sur le Web. Il suffit pour s’en convaincre de recenser les plateformes nées pendant le confinement. Toutes sont aujourd’hui en quête d’une nouvelle vie. Grand Châtellerault réfléchit à une « plateforme numérique marchande ». Au niveau régional, l’Agence de l’alimentation Nouvelle-Aquitaine, qui avait lancé fin mars plateforme. produits-locaux-nouvelle-aquitaine.fr, a engagé « un travail pour la faire vivre et évoluer ». Quant à la plateforme jeparticipe-grandpoitiers.fr, elle a vécu. « Elle permettait juste de savoir où trouver un commerce ouvert, note Julie Reynard, adjointe à l’Economie circulaire et de proximité à Poitiers. Nous réfléchissons à la mise en place d’un marketplace, un outil qui devra tenir compte de ce qui existe déjà, des besoins et des usages. Et impliquera la formation des acteurs. »
Face à une demande potentiellement en mutation, l’offre doit en effet se structurer. « C’est le bon moment pour rebattre les cartes des circuits de commercialisation », note Laurence Bouher, chargée de projet à l’Afipar. A cet effet, l’Association de formation et d’information pour les paysans et les ruraux met en place début 2021 des ateliers de co-construction à destination des producteurs déjà en circuit court et une formation inédite « pour des producteurs qui sont en filière longue et ne sont pas tout à fait bien dans leur pratique actuelle ».
Certains entrepreneurs ont déjà amorcé la transition. Au-delà des classiques créations-reprises d’entreprises, « nous avons le cas de personnes qui veulent se reconvertir ou changer la philosophie de leur projet », constate Rodolphe Houdayer, directeur du service économie de la Chambre de métiers et de l’artisanat. Un restaurateur qui envisage de développer la vente à emporter comme activité principale, un projet de conserverie sur Châtellerault... Autant d’affaires à suivre.

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