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En théorie, la « prime Covid » doit récompenser les efforts des salariés et agents au front face à la maladie. Dans les faits, son versement est soumis à de nombreux critères.
Sur le principe, attribuer une prime exceptionnelle aux salariés qui se sont retrouvés en première et en seconde lignes face au Covid-19, cela semble une bonne idée. Et pour ceux qui la toucheront, ça l’est ! Le problème, c’est que l’Etat n’a pas fixé de règle nationale. Cette prime est défiscalisée, ce qui la rend plus facile à débloquer par les employeurs. Mais les critères d’attribution sont nombreux et, surtout, la décision est laissée à la discrétion de ces mêmes employeurs qui n’ont, après cette crise, pas toujours les moyens ou le désir de la mettre en place. « C’est un effet d’annonce, clame Catherine Giraud, secrétaire générale de l’union départementale CGT. Au début, l’Etat a dit aux salariés « Votre vie vaut 1 000€ ». On les a envoyés au front, souvent sans arme, en leur faisant miroiter cette prime, mais dans beaucoup de cas, ils ne l’auront pas. »
Le CHU dans l’attente
Là où elle existe, cette prime est parfois octroyée en fonction du niveau de salaire ou au prorata du temps de présence. Salariés en télétravail ou dans l’entre- prise peuvent ainsi recevoir un traitement différent. Sans compter que certains volontaires n’ont pas pu revenir, faute d’activité suffisante. L’Etat versera en direct jusqu’à 1 000€ net de prime à 400 000 fonctionnaires (enseignants, policiers, surveillants pénitentiaires...). Du côté des soignants, c’est différent. Au CHU de Poitiers, Céline Laville a fait les comptes. La présidente de la Coordination nationale infirmière estime qu’« environ 500 personnels paramédicaux et administratifs » devraient logiquement être gratifiés pour avoir travaillé au contact des patients Covid-19. Un décret daté du 14 mai permet aux directeurs de bonifier cette prime de 500 à 1 500€. La décision sera-t-elle prise avant l’été ? « Nous sommes dans l’attente de précisions concernant les modalités de versement de cette prime, en particulier le pourcentage d’agents qui pourrait être concerné par le versement dérogatoire », indique la direction de l’hôpital.
L'aide à domicile oubliée
Parmi les injustices, un cas semble plus emblématique que les autres : celui des auxiliaires de vie. Elles -ce sont surtout des femmes- ont continué à s’occuper des seniors pendant le confinement. Matin, midi et soir, elles se sont rendues à leur domicile pour la toilette, le repas, le coucher, en gérant les carences de gel, de masques et de gants. Mais fin avril, les députés ont rejeté un amendement prévoyant de verser directement 1 000€ de prime aux « petites mains » de l’accompagnement humain. « Que ce soit l’Etat ou les Départements, dans le cadre de leur compétence sur l’aide sociale, peu importe. Il faut une prime pour nos salariés qui sont plongés dans le désarroi. Leur travail a la même valeur que les autres », plaide Jean-Louis Guilbaud, président de l’ADMR 86, premier réseau associatif d’aide à la personne. Le personnel du CCAS, comme tous les agents de la Ville de Poitiers présents pendant le confinement, recevra en juillet 30€ de prime par jour de présence. Mais les structures restent, elles, trop fragiles pour la verser. De quoi relancer le débat sur leur financement et les tarifs réglementés qui ne leur laissent aucune marge de manœuvre. En attendant, les auxiliaires de vie sont donc condamnées à rester dans l’ombre.
Photo : Ville de PoitiersÀ lire aussi ...
lundi 23 décembre