Aujourd'hui
Fabrice Crouzet. 52 ans. Fondateur du simulateur de chute libre ZerOGravity, aux portes du Futuroscope. Ancien ingénieur hydraulicien-mécanicien dans l’univers du pétrole. Père de trois filles. Adore voyager. Mais ne s’exonère pas d’une vraie réflexion sur son empreinte carbone.
L’Afrique lui manque. Les Africains aussi. Leur « simplicité », leur « bonne humeur », leur « insouciance ». Jusqu’à ses 17 ans, Fabrice Crouzet a vécu en Côte d’Ivoire, au Sénégal et au Kenya. Des tranches de vie simplement entrecoupées d’intermèdes « à Marseille et en Norvège, d’où ma mère est originaire ». Avec un père « dans le pétrole », le natif d’Abidjan a beaucoup voyagé. « Partir sur des plateformes m’a fait rêver tout petit », reconnaît-il du haut de ses 52 printemps. Un rêve devenu réalité après avoir décroché un diplôme d’ingénieurs -spécialiste hydraulique-mécanique- à Grenoble. Seulement voilà, en 2017, il a tourné le dos à sa « vie d’avant ». « Non pas que mon job ne me plaisait plus, au contraire. J’ai juste eu envie d’arrêter de courir après les avions et de passer ma vie dans une chambre d’hôtel. »
De Biscarosse à Chasseneuil-du-Poitou, ce fan et pratiquant de « sports aériens » a donc fait le grand saut vers une vie sans doute moins confortable -« je bosse plus qu’avant !»- mais plus en phase avec ses attentes. Il est à moins de 2km de son domicile, voit sa dernière fille (5 ans) tous les jours, alors qu’il n’a « pas beaucoup vu grandir ses deux aînées » (21 et 19 ans), relève un nouveau challenge « passionnant »... Bref, son rythme a changé mais sa soif de défis est étanchée. C’est à lui qu’on doit l’immense bâtiment qui a émergé aux portes du Futuroscope. Nom de code : ZerOGravity. Fonction : simulateur de chute libre. Utilité : accélérateur de sensations fortes. En théorie, l’immense soufflerie (7,8M€ de travaux) aurait dû charrier ses premiers « cobayes » le 18 avril. Le confinement total décrété le 17 mars a douché son enthousiasme communicatif.
« Ce n’est pas tout à fait naturel de sauter d’un avion en parfait état de marche »
« Les sept moniteurs étaient recrutés, les six autres personnes nécessaires pour l’accueil et le bar en passe de l’être... On a pris un gros coup de massue sur la tête, mais le confinement n’est pas un coup d’arrêt », veut croire le co-fondateur de ZerOGravity. Pour ce sportif de bon niveau et compétiteur dans l’âme, le challenge à venir sera juste un peu plus corsé. Pour l’heure, son horizon ne dépasse pas « début juillet, date à laquelle on espère ouvrir ». Le projet de sa « deuxième vie » vient de loin, il s’épanouit dans un département dont il ne connaissait « rien », alors qu’il est pratiquement né sur le tarmac de l’aérodrome de Mimizan. C’est là qu’un de ses amis lui a refilé le virus du parachutisme. « De l’adrénaline », mais pas seulement. « J’ai goûté à cela une première fois et j’en suis dingue. Ce n’est pas tout à fait naturel de sauter d’un avion en parfait état de marche (rires). Mais il y a une fraternité entre les parachutistes. Un esprit de famille. Vous pouvez avoir des soucis, un saut en parachute efface tout. »
« Je veux rester positif pour mes filles »
Fabrice Crouzet fut associé à un premier projet (avorté) de simulateur de chute libre. L’idée a continué de lui « trotter dans la tête ». Avec ZerOGravity en guise de conclusion. Un projet « terrien »... et moins énergivore que le saut en parachute, gros consommateur de kérosène. Le confinement l’a « fait réfléchir » sur sa propre empreinte carbone, lui qui a bossé pendant près de trente ans dans les énergies fossiles et adore voyager. « Pour le moment, on ne peut pas s’en passer, se défend-il. Mais je reconnais que la disparition d’espèces animales et le changement climatique sont des éléments inquiétants. Je veux rester positif pour mes filles. Il faut que nous revenions à plus de proximité. »
La proximité, il la cultive depuis l’automne 2018 et son installation dans la Vienne, où il a reçu « un accueil extraordinaire ». Comme s’il faisait partie de la famille. « On a vraiment l’impression, avec ma compagne, d’être très bien intégrés... » Il faut dire que l’homme est avenant et ouvert. Un sens du contact inné, héritage de ses racines africaines. Ce continent qui lui manque tant, sur lequel il a posé le pied la dernière fois après un saut... en parachute au Sénégal. On ne se refait pas.
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