Hier
Gwennaëlle, 38 ans, vit avec le Covid-19 depuis quarante jours. Le virus épuise son corps et bouleverse au quotidien sa vie de famille. Plus que tout, elle a le sentiment qu’il l’exclut de la société.
Gwennaëlle, 38 ans, maman de deux petits garçons, ne présentait aucun des facteurs de co-morbidité censés désigner au Covid-19 ses victimes favorites. Et pourtant, depuis quarante jours, la jeune femme d’ordinaire sportive vit avec le virus, à la merci de ses caprices qui l’ont déjà placée à trois reprises en détresse respiratoire. Aujourd’hui la Sancto-Bénédictine espère avoir atteint l’étape de la « cicatrisation pulmonaire ». Mais, en l’absence d’examen radiologique pour le confirmer, l’incertitude persiste. Gwennaëlle vit avec depuis le 23 mars.
« J’ai commencé par avoir des maux de tête et une forte fièvre. Cela a duré neuf jours. J’avais d’énormes frissons, j’étais glacée pendant quatre ou cinq heures. J’étais fébrile. » Gwennaëlle se plie aux consignes : rester chez soi en attendant que les symptômes disparaissent. Ou, dans son cas, empirent. Ayant de plus en plus de mal à respirer, le 28 mars, elle appelle le 15. Le médecin de garde diagnostique une simple bronchite et lui prescrit « un sirop pour la toux ». Mais l’état de la jeune femme continue de se détériorer. « J’éprouvais une gêne respiratoire, j’avais comme un poids sur le thorax qui irradiait dans le dos. Je dormais vingt heures par jour, je ne pouvais plus me lever… J’ai perdu 4kg en quatre ou cinq jours. » La codéïne soulage ses douleurs thoraciques, mais elle perd le goût, l’odorat ainsi que l’ouïe d’un côté. Son médecin traitant la suit régulièrement par téléconsultation.
« Le virus a complètement chamboulé ma vie »
« Le 15 avril, on m’a fait un dépistage naso-pharyngé, qui est revenu négatif. » Pas de « chance », le virus n’était pas dans l’organe testé. Pourtant les symptômes se confirment. « Je toussais à ne plus pouvoir respirer, en expulsant des sécrétions par le nez et par la bouche. Si bien que mon médecin, suspectant une infection pulmonaire, m’a placée sous Augmentin (ndlr, un antibiotique) pendant sept jours. Le 22 avril, j’ai fait une nouvelle détresse respiratoire avec douleur thoracique et j’ai été transportée au CHU par le Samu. »
Gwennaëlle n’est pas près d’oublier ce « transfert dans des conditions particulières », entourée de soignants en combinaison, masqués et gantés, et le cheminement réservé aux patients Covid. « Nous n’avons croisé personne, toutes les portes se refermaient derrière moi, c’était… très particulier. » Diagnostic : suspicion d’embolie pulmonaire. « On m’a perfusée en vue d’un angio-scanner. » Finalement annulé. Gwennaëlle est renvoyée chez elle jusqu’au lendemain. Elle se présente au CHU pour une scintigraphie pulmonaire. Niveau-3, bien assez pour l’essouffler. Dans le couloir, elle est prise d’une toux carabinée. « Un homme a crié avec agressivité : « mais qui est-ce qui tousse comme ça dans le couloir ? » J’ai vraiment eu le sentiment d’être une pestiférée. Et je suis repartie sans avoir vu un médecin, ni avoir eu un diagnostic. Un interne du service de médecine nucléaire a juste confié à mon médecin traitant que sa patiente « avait les poumons d’une personne en réanimation ». » Rien de rassurant… « Je m’interroge sur les séquelles que pourraient avoir mes poumons dans deux, trois, dix ans… »
« Maman a le vilain virus »
Selon le dernier examen clinique réalisé par son médecin, Gwennaëlle pourrait avoir atteint le stade de la « cicatrisation pulmonaire ». Si seulement… « Le virus a complètement chamboulé ma vie, confie-t-elle. Depuis plus d’un mois, mon conjoint fait tout à la maison : le ménage, les repas, les courses… C’est fatigant. Et ce n’est pas notre fonctionnement familial habituel. » Le Covid-19 a également modifié sa relation avec ses fils, de 3 et 8 ans. « Au début, ils n’avaient pas le droit de m’approcher. Mais au bout de vingt-cinq jours, j’ai recommencé à leur faire des bisous, sur la tête uniquement. Je suis là mais je ne fais rien avec eux. »
Qu’est-ce que les deux petits garçons comprennent de cette étrange situation ? « Le plus petit dit que « maman a le vilain virus ». » Le plus grand téléphone à ses copains, comme sa maman. « J’ai une amie qui m’appelle très régulièrement, elle me fait rire, ça me fait tousser mais on s’en fiche ! Et puis j’évacue des sécrétions, donc ça m’aide à guérir », positive la jeune femme qui écoute beaucoup de musique, dessine aussi. « Cela ne me fatigue pas et cela me permet de m’évader de la maladie. » Et d’oublier d’autres contrariétés.
En tant que professionnelle indépendante, Gwennaëlle est sans revenu, éligible à aucune indemnité et ne sait pas quand elle pourra reprendre son métier basé sur la relation client. « Après avoir maudit le Covid, je suis en colère après le système. J’ai la sensation d’être à part, exclue de la société. » Aujourd’hui, Gwennaëlle n’aspire qu’à « (se) soigner et retrouver (sa) vie d’avant ». Son passeport pour l’évasion : un billet d’avion pour New York, en décembre.
À lire aussi ...
Hier
DMLA : un implant innovant
Contre la DMLA atrophique, il n’existe pas de traitement mais il est possible d’améliorer la vue des patients, sous conditions, grâce à des technologies innovantes telles que le SING IMT, un implant nouvelle génération. Plus de détails avec le Pr Levéziel, du CHU de Poitiers.
jeudi 21 novembre