Aujourd'hui
Une hygiène à ne pas négliger
Catégories : Société, Santé, Social, Solidarité, CHU Date : jeudi 19 mars 2020On estime que tous les dix ans, les Français perdent en moyenne vingt minutes de temps de sommeil. Le Pr Xavier Drouot, neurophysiologiste au CHU de Poitiers et responsable du centre régional des pathologies du sommeil, fait le point sur ce constat, lié notamment à l’évolution de nos modes de vie.
Une récente étude norvégienne montre que le temps de sommeil a un impact sur la santé mentale des enfants. Est-ce une découverte ?
« Probablement, car les études sur le sujet sont encore peu nombreuses, difficiles à faire et criticables car souvent menées sur de faibles panels. Celle-ci a été réalisée sur près de 800 enfants, ce qui est quand même une grosse cohorte. Reste que ce lien entre le sommeil et la santé mentale, on le soupçonnait depuis plusieurs années. Quand des adultes ne dorment pas, on constate chez eux des problèmes cognitifs, d’irritabilité. Mais nous ne sommes pas tous égaux face au manque de sommeil, certains le supportent très bien. Au centre d’investigation clinique (CIC) de Poitiers, nous avons réalisé une étude visant à empêcher des personnes de dormir pour en mesurer les effets. Il y a des gens dont les performances s’effondraient après une nuit blanche et d’autres dont les performances n’étaient pas altérées malgré l’absence de repos. »
Quelles sont les causes récurrentes à ce manque de sommeil ?
« La plus fréquente est la négligence. Les gens grignotent sur leur sommeil car souvent, dans les grandes villes, c’est du temps qu’ils ont l’impression de perdre dans les transports. Et surtout, les nouvelles technologies ont permis à la vie sociale de se prolonger dans la soirée, où l’on n’hésite plus à avoir l’ordinateur ou le smartphone avec soi dans le lit. Or il a été démontré que ces habitudes détériorent la qualité du sommeil, car la lumière très bleue des écrans est interprétée par l’œil comme si c’était celle du soleil. »
Comment y remédier ?
« Il faut faciliter une espèce de confort. On demande alors aux patients de se coucher et de se lever à des heures fixes, d’éviter de regarder la télévision dans le lit, de ne pas travailler trop tard, d’éviter les sodas, de se détendre, de ne pas s’exposer à une lumière trop vive… C’est une hygiène de sommeil à avoir. Un adulte doit dormir environ huit heures par nuit. Mais globalement, on a bien dormi lorsque l’on se réveille spontanément le lendemain. »
Que pensez-vous du phénomène ASMR (*), très prisé des jeunes ?
« Je ne suis pas contre. Tout ce qui va aider à se détendre, à se concentrer sur quelque chose de doux, de sinueux permet au cerveau de diminuer son excitation. Mais cette étape se prépare deux à trois heures avant l’endormissement. Si les jeunes n’utilisent que le son de ces vidéos, sans regarder les écrans, il n’y a aucun danger. En tout cas, moins que de prendre un hypnotique ou un relaxant pour s’endormir. »
(*) de l'anglais Autonomous Sensory Meridian Response, que l'on peut traduire par « réponse autonome sensorielle culminante », une méthode de relaxation auditive très répandue par le biais de vidéos sur le web.
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