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De la souffrance à la sophro
Catégories : Société, Social, Solidarité Date : mercredi 19 février 2020Claire Maunie-Debin. 39 ans. Sophrologue à Jaunay-Marigny. Mère de trois enfants. Victime d’un burn-out en 2012. A, depuis, radicalement changé sa manière d’être et de fonctionner. Signe particulier : raffole des escapades en forêt pour se (re)connecter avec elle-même.
Elle accepte aujourd’hui d’en parler « sans problème », alors qu’il y a un encore un an prononcer le mot en public relevait du défi. Burn-out. Epuisement professionnel dans la langue de Molière. La pathologie, pas encore reconnue par l’Organisation mondiale de la santé, a « séché » Claire Maunie-Debin. Pendant dix ans, la working girl a accumulé les responsabilités comme on collectionne les trophées. « Avec une forme de boulimie d’apprendre et de comprendre. » Elle se rêvait en professeure -« et astronaute au début »-, elle s’est révélée une excellente (co)-dirigeante d’entreprise (40 salariés), après avoir gravi les échelons quatre à quatre. « Une nénette dans le bâtiment, elle doit redoubler d’efforts pour être crédible et légitime. Elle doit montrer qu’elle sait... »
Pendant longtemps, la fille de directeur de magasin et d’assistante de direction a donc « fait ce que les autres attendaient d’elle », avec un niveau exigence presque excessif. Jusqu’à ce qu’elle tombe, il y a huit ans. Littéralement. KO debout telle une boxeuse saoulée par les coups. Elle enchaîne les arrêts maladie, peine à verbaliser ce qui lui arrive, mais refuse de retourner à sa vie d’avant. Avec du recul, Claire juge cette « petite mort bénéfique ». Parce qu’elle lui a permis de se réapproprier sa vie. De son enfance, la Poitevine garde un souvenir ambivalent. « Excellente à l’école », « hypersensible » et « profil à haut potentiel », la gamine raffole des soirées dans sa chambre à regarder la Lune, quand son entourage l’enjoint à « entrer en contact avec les autres », à faire du sport... Bref, à exercer son droit à l’insouciance juvénile. Sauf qu’elle peine à comprendre comment elle fonctionne. Comme un sentiment d’être en décalage avec elle-même.
« Je n’avais pas compris »
De la souffrance à la sophrologie, de l’incompréhension à la maîtrise des émotions, la mère de trois enfants (15, 11 et 4 ans) a cheminé. La sophrologie l’a aidé, la psychologie aussi. Côté patient s’entend. « Les premières séances, j’avais l’impression que j’étais dans une sorte de sieste collective, qu’on se fichait de moi ! Je n’avais pas compris le rôle des émotions et je ne faisais pas confiance à mes intuitions... », raconte-t-elle d’une voix douce et assurée. Les années ont passé et ses planètes sont désormais alignées, même s’il lui arrive encore de se sentir oppressée par « un milliard d’idée à la seconde ». N’empêche, la dirigeante de CMB a radicalement changé ses priorités. « Avant, je gagnais très bien ma vie et il pouvait m’arriver de dépenser beaucoup d’argent pour des choses qui me paraissent aujourd’hui très futiles : le coiffeur, le maquillage, les vêtements... Désormais, mon petit plaisir, ce sont les livres que je dévore. »
L’Alchimiste, de Paulo Coehlo, figure en bonne place sur sa table de nuit, au côté d’une pierre en quartz symbole de transparence, et d’un petit carnet sur lequel elle note ses rêves. « Je dis toujours à mes clientes de faire confiance à leurs rêves... » Les siens la transportent aussi souvent que possible en forêt, où il lui arrive de marcher pendant des heures, seule avec son chien. L’autre jour, la naturophile (sic) s’est même payé la gourmandise d’un très long tour du lac de Saint-Pardoux -24km-, en Haute-Vienne. Avec nuit en van dans la foulée, histoire de redevenir la petite fille qu’elle était, scotchée par le spectacle céleste. Sa conversion lente mais assurée a désarçonné son entourage, elle en convient. Le prix à payer pour « redevenir moi-même ».
Elle ne regarde plus les infos
Dans son quotidien, Claire Maunie-Debin s’extrait autant que possible des « colères du monde », auxquelles elle se sait sensible. Ce qui signifie un usage très modéré des réseaux sociaux et un accès encore plus limité aux infos. Ça lui « fait du bien ». « 1984, d’Orwell, je n’ai même pas pu aller au bout tellement ce qu’il décrit est terrifiant. » Les connexions avec l’extérieur, elle les nourrit au fil des rendez-vous avec sa clientèle d’hommes, de femmes, d’enfants en recherche de solutions pour vivre mieux. Dans la peau de la « soignante », au sein de son cabinet-refuge de Jaunay-Marigny, la sophrologue excelle. Parce qu’elle est « passée par toutes ces épreuves », elle se fait un devoir d’éclairer tous ceux et celles qui sont au milieu du tunnel. Soit grâce à des vidéos postées sur Internet, soit grâce à des conférences sur le burn-out. Poser des mots sur ses maux. Dédramatiser. Ne pas culpabiliser. Les verbes d’action affleurent. La thérapeute a elle-même mis en place « des stratégies pour gérer ses fragilités ». A commencer par le poids de l’âge sur notre apparence. « Il y a encore dix ans, je n’aurais pas supporté d’avoir un cheveu blanc. Aujourd’hui, je m’en fiche complètement, j’ai atteint une forme de maturité. Je vis bien mes 39 ans. » Et si c’était ça le bonheur ?
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