Hors normes et si précieux

Deux associations franciliennes allient leurs efforts pour venir en aide à de jeunes autistes, au mépris des normes. Une nouvelle leçon d’humanité, d’une grande sensibilité, par le duo de réalisateurs Toledano-Nakache (Intouchables).

Steve Henot

Le7.info

Son téléphone ne cesse de sonner. Il n’y a pas un jour sans que Bruno ne soit sollicité pour prendre en charge un nouvel enfant autiste, au sein de son association. Débordé, il peut toutefois compter sur son ami Malik pour former des jeunes issus des quartiers difficiles et l’aider ainsi à répondre à des besoins toujours plus pressants. En dépit de leur bonne volonté, Bruno et son équipe n’ont pas d’agrément ni de qualification qui les autoriserait à s’occuper d’un public aussi sensible. Ce qui n’a pas échappé à l’inspection générale des affaires sociales (Igas)…
L’histoire et les scènes sont vraies. Elles témoignent notamment de la situation des jeunes présentant les formes d’autisme les plus sévères en milieu hospitalier (sédation, isolement…). Le film d’Eric Toledano et d’Olivier Nakache illustre surtout le malaise que suscite ce trouble mental dans toutes les couches de la société, jusqu’à l’Igas. Cet angle met en lumière le travail « hors normes » -dans tous les sens du terme- de ces associations, nées du profond altruisme de ses acteurs. Brillants de sobriété, Vincent Cassel et Reda Kateb incarnent ces valeurs de solidarité avec conviction et portent l’émotion avec une grande délicatesse. Il faut aussi louer l’objet cinématographique, narré avec brio, alliance de belles images et des compositions accrocheuses du duo allemand Grandbrothers. Plus qu’un docufiction sur l’autisme et sa difficile prise en charge, Hors normes est un hommage à ces hommes et femmes qui donnent sans limite. Il rappelle aussi combien leur action est précieuse et mérite d’être soutenue (5% du ticket d’entrée est reversé à l’association Le Silence des justes).

Comédie dramatique de Eric Toledano et Olivier Nakache, avec Vincent Cassel, Reda Kateb, Hélène Vincent (1h55).


 


Le mot de… Christiane De Pasquale, fondatrice du Caap (Centre pour adultes avec autisme du Poitou)
« Je suis toujours très prudente avec les films traitant de l’autisme, qui sont souvent dans la sensiblerie… Mais ici, j’ai eu la bonne surprise d’être dans la réalité de notre quotidien. Hors Normes a le mérite de ne pas montrer que des autistes surdoués -comme Rain Man- qui ne représentent que 10% des cas. Les réalisateurs ne font pas de détour, les scènes sont très réelles. Même si j’ai trouvé le film assez gentil sur le côté médical, car je pensais que l’on verrait plus de contentions physiques par exemple. Le film montre aussi des périodes associatives complexes, comme nous en avons connues, où nous devions faire la preuve de ce que l’on fait. Heureusement, nous avons été entendu. Nous avons aussi vécu ces échanges avec des inspecteurs qui ne connaissaient rien à l’autisme, étaient déconnectés de la réalité du terrain. Ils méritaient un peu ce film, j’espère que cela va faire un peu réfléchir. Il m’est parfois insupportable de revoir des choses que nous avons vécues, dans des films ou des expositions sur le sujet, mais les pointes d’humour et le dynamisme du film m’ont épargné ce sentiment. C’était très bien.  »

Séance spéciale dimanche 3 novembre, à 16h, au CGR Castille, suivie d’un débat autour du quotidien des personnes avec autisme.

À lire aussi ...