La « ramasse » à peu de frais

Les associations de collecte de denrées alimentaires de la Vienne sont confrontées à une baisse sensible de la « ramasse », ces produits issus de la grande distribution. Le phénomène, récent, s’explique mais inquiète. 

Claire Brugier

Le7.info

Une fois n’est pas coutume, pour ses 35 ans, la Banque alimentaire de la Vienne a ouvert la semaine dernière les portes de son entrepôt, à Poitiers-sud. Si le bâtiment est discret, l’activité à l’intérieur est intense. On y trie, transporte, répartit sans relâche pas moins de 1 100 tonnes de produits par an, lesquels sont distribués à 11 000 bénéficiaires par une soixantaine d’associations.

Un chiffre pourtant ne laisse d’inquiéter la présidente Annie Héquet : la baisse de la « ramasse », estimée à « 40% ces deux derniers mois ». Juste « dramatique » quand on sait que cette collecte des « dates courtes » des grandes surfaces représente 45% de l’approvisionnement de la Banque alimentaire. 

Elle est donc essentielle, ici comme aux Restos du coeur où la baisse est de l’ordre de « 30% depuis le printemps, estime la présidente Sylvie Moriceau. C’est véritablement un handicap car ce sont en général des produits frais, notamment de la viande, des yaourts... Ou des « petites cochonneries » comme des Pères Noël en chocolat, qui permettent de gâter les bénéficiaires. »

Non pas que la grande distribution ait décidé de couper les vivres aux associations caritatives. 96% des grandes et moyennes surfaces travaillent avec elles(*) et 47% sont collectées quotidiennement. Mais les dons ne sont qu’une solution parmi d’autres pour lutter contre le gaspillage alimentaire, ainsi que les y enjoint la loi Garot (2016).

Des « dates courtes » très convoitées

La grande distribution peut aussi choisir d’améliorer la gestion de ses stocks ou développer le « stickage ». C’est le cas : 87% des grandes et moyennes surfaces y auraient recours, ce qui se traduit par l’apparition de rayons à -30% ou -50% pour accélérer la vente des « dates courtes ». Or, ce sont ces produits, précisément, qui font le gros de la « ramasse », avec des dates de péremption à J-2 ou J-1, parfois « périssables au jour J », ce qui n’est pas sans conséquence. « Sur les 157 tonnes collectées par an, tout n’est pas distribuable », déplore Gilberte Thiollet, responsable de l’approvisionnement aux Restos du cœur. 

Face à cette crise de la « ramasse », les solutions diffèrent. « Nous envisageons de demander davantage au national, explique la bénévole. Du côté de la Banque alimentaire, la solution revient aux associations distributrices. « Nous n’augmenterons pas forcément nos prix (ndlr, 10 à 30% du prix réel), assure Michèle Dominguez, responsable de l’épicerie social de L’Eveil, à Poitiers (1 300 inscrits). Mais nous allons devoir acheter par nous-mêmes. Nous pensons aussi à développer le vrac... »

(*) Etude 2019 d’Ipsos pour Comerso « Distribution/Retail : objectif zéro déchet ».

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