« L’accès à ses origines est essentiel »

Alors que l’examen des lois de bioéthique a démarré à l’Assemblée nationale, la question de l’accès aux origines divise. Céline, 47 ans, a découvert il y a un an et demi qu’elle avait été conçue grâce à un don de gamètes. Après des tests génétiques, elle s’est découvert six demi-frères et sœurs…

Arnault Varanne

Le7.info

Le courriel est arrivé dans sa boîte mail le 6 août, alors qu’elle l’attendait le 19. Psychologiquement, il lui a fallu encaisser les informations délivrées par la plateforme 23andme.com (*). A 47 ans, Céline a appris il y a un mois et demi, derrière un écran, qu’elle avait six demi-frères et sœurs, en majorité dans l’Est de la France. Ils sont pour la plupart nés à Reims, Nancy et Metz. « C’est quelque chose de violent et en même temps très émouvant, ces noms de gens qui apparaissent et avec lesquels on partage un patrimoine génétique… », admet la mère de famille. Le choc est d’autant plus violent qu’elle ignorait jusqu’au début de l’année dernière avoir été conçue grâce à un don de gamètes. Tout une histoire familiale à appréhender et à découvrir. 

« Besoin de détricoter mon histoire »

Céline a accusé le coup, a « compris des choses après coup ». Sa (petite) taille, ses yeux bleus, sa peau claire dans « une famille où tout le monde est grand avec la peau mate… Pendant des années, ces questions m’ont vraiment travaillée, mais je me satisfaisais des réponses qu’on m’apportait. » Quelques mois après, elle a adhéré à l’association PMAnonyme, où elle correspond avec « des gens qui ont la même histoire ». La recherche du donneur ne constitue pas une obsession. « J’ai des parents qui m’aiment et que j’aime. Mais j’ai besoin de détricoter l’histoire que je me suis construite depuis mon enfance. » Certains échanges courants se transforment en casse-tête. Comme dire à son médecin traitant et spécialistes les antécédents médicaux, où se trouvent les racines familiales. « Alors que c’est un truc hyper-important chez moi ! »

« Le droit de l’enfant »

Rétrospectivement, Céline regrette que ses parents ne lui aient rien dit en 1994, au moment de la perte de son deuxième enfant, né à 7 mois mais atteint d’une affection génétique rare. « Je comprends leurs raisons, surtout dans le contexte des années 70 mais Ils m’ont laissée chercher pour rien… » Aujourd’hui, sa quête de « vérité » coïncide avec l’examen de la future loi de bioéthique, dans laquelle les éléments sur l’anonymat des donneurs ne trouvent pas grâce à ses yeux. « L’intérêt de la famille est toujours supérieur à l’intérêt de l’enfant », soupire-t-elle (voir encadré) « qui a le droit de savoir d’où il vient ». Dans un avenir proche, elle aimerait peut-être rencontrer ses demi-frères et sœurs. Savoir quand eux ont su, comment ils ont réagi, quels nouveaux liens ils veulent tisser, combien ils sont au final à avoir un seul et même géniteur… « Rien ne remplacera ce que nous avons construit avec ma sœur, mon père et ma mère. » Reste une certitude chez elle, pas forcément partagée : « L’accès à ses origines est essentiel. »

(*) Ce type de plateformes est interdit en France.

 

Ce que défend le gouvernement
Si le projet de loi est adopté en l’état, un donneur devra obligatoirement accepter que son identité puisse être dévoilée à l’enfant issu de ce don, seulement après sa majorité. Les enfants qui le souhaitent pourront alors déposer une demande auprès d’une commission d’accès aux origines, dépendante de l’Agence de biomédecine. Mais le principe de rétroactivité ne s’appliquera pas. Toutefois, les personnes ayant fait un don de gamètes avant ces nouvelles lois de bioéthique pourront se manifester auprès d’une commission spéciale.

 

 

 

 

 

 

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