Florent Dubois. 57 ans. Vient d’ouvrir une brasserie « à l’ancienne » à Poitiers baptisée La Mangeoire. Ce Châtelleraudais est revenu dans la Vienne pour retrouver son amour de jeunesse, après une carrière passée entre New York et Orléans. Signe particulier : passe autant de temps en cuisine qu’à discuter avec ses clients.
La Mangeoire est ouverte. Tapisserie jungle, nappes Vichy rouge et blanc, cafetières au charme désuet sur les étagères... Tout est fait pour rappeler les anciens bistrots, des portions copieuses à l’accueil. Chez Florent Dubois, l’ambiance est conviviale. Après le service, en ce jeudi après-midi ensoleillé, les deux serveuses Noémi et Mélissa prennent un café en terrasse pendant que Teddy, jeune cuisinier, discute avec des clients. Entre l’effervescence de la salle et l’atmosphère feutrée des cuisines, le propriétaire des lieux n’a jamais voulu choisir. « J’adore venir discuter à chaque table et je demande à mon équipe de faire pareil. » La recette a connu un certain succès à Orléans. Là-bas, Florent Dubois a lancé le concept en toute simplicité il y a vingt ans. « J’ai même refusé des gens certains jours. » Mais le restaurateur a préféré vendre au sommet de sa gloire. La raison ? L’amour ! Il y a deux ans, ce restaurateur né à Châtellerault a retrouvé sur les réseaux sociaux son premier amour, Laurence. Professeure d’histoire-géo à Rochefort, elle habitait à Poitiers. L’alchimie a fonctionné comme trente-cinq ans plus tôt.
Les soirées avec Sting
A l’époque, le couple a la vingtaine. Lui, bac pro en électrotechnique décroché au lycée Branly, « s’ennuie » dans l’industrie. Le cursus en hôtellerie-restauration suivi par sa « douce » suscite la curiosité. De son côté, elle décide de partir à Paris pour vivre de nouvelles expériences. Le cœur meurtri, Florent Dubois démissionne, tente de la rejoindre mais la relation s’arrête. A la capitale, il devient serveur et rencontre du monde, des Français et des étrangers, grâce à son tempérament avenant et sympa.
On lui parle de New York. Bercé par le rêve américain, la mu- sique, les films et les grosses voitures, il part avec son « petit sac vert pomme Adidas » pour quelques jours de vacances. « Au bout d’une semaine, j’avais déjà du travail. En tant que Français, tu as la cote dans les restaurants. J’ai eu des bons postes, la vie là-bas était fantastique, j’ai terminé des soirées avec des stars comme Sting. » Il prolonge finalement son séjour pendant... cinq ans.
Là-bas, le Frenchy fait la connaissance de Sybilla, une Américaine passionnée de culture française. Tous les deux reviennent dans l’Hexagone et s’installent à Orléans, où Florent a gardé des attaches. Ensemble ils ont trois enfants, dont l’aîné, docteur en astrophysique, vient d’entrer au service de la Nasa à 27 ans. Un autre genre d’étoiles. Entre-temps, Florent a appris officiellement la cuisine et a donc lancé La Mangeoire en bord de Loire en 2000.
Repartir de zéro
Le couple finit par se séparer. Quelque temps plus tard, le projet poitevin se dessine. «Je ne suis pas du genre à prendre des décisions. J’attends que la vie me charrie. Mais à ce moment-là, je suis reparti de zéro professionnellement et sentimentalement. Si tu n’essaies rien, tu n’as rien, ajoute-t-il. Heureusement, il ne m’arrive que du positif depuis que je suis à Poitiers. » Le voilà désormais engagé dans une nouvelle aventure où tout reste à construire.
Il peut compter pour cela sur le soutien de sa mère et de sa sœur, restées dans la Vienne. A 57 ans, le restaurateur tient à fermer le dimanche ainsi que les lundis et mardis soir, histoire de « préserver la vie de famille ». Et de prendre le temps de dîner avec sa « douce ».