Poitiers-Limoges, axe sensible

Chaque nouveau projet d’aménagement de la RN147, par tronçon, suscite le débat et réveille la question sensible d’une possible autoroute A147. Le dossier est loin d’être refermé...

Claire Brugier

Le7.info

La concertation volontaire lancée début mars par la préfecture de la Vienne sur le contournement -ou pas- de l’entrée sud-est de Poitiers, à hauteur de Mignaloux-Beauvoir, a ravivé les débats autour de l’aménagement de l’axe Poitiers-Limoges.

Route nationale ? Autoroute ? Quels tracés ? A quelle échéance ? La bataille des arguments fait rage, alimentée par les partisans et détracteurs des différentes solutions avancées depuis des décennies. A charge pour l’Etat de démêler cet écheveau qui fait désormais figure d’Arlésienne.

Autour du dossier, les esprits s’échauffent. « Il y en a marre ! » s’indigne Claude Lafond. Le président de la Chambre de commerce et d’industrie de la Vienne balaie d’un revers de main la position incertaine du Département. « Nous attendons depuis cinquante ans ! Payante ou non, nous voulons une voie digne de ce nom entre Poitiers et Limoges. Des contributeurs privés sont prêts à la financer. » 

Au fil des décennies, l’impatience a gagné les rangs du monde économique. Le manifeste pour l’autoroute A147 a déjà récolté 2 000 signatures entre Vienne et Haute-Vienne. « L’enjeu est de multiplier les flux entre Poitiers et Limoges, tout en favorisant le désenclavement du Sud-Vienne, en particulier le Montmorillonnais et le Civraisien, note Vincent Morlat, membre du Club des entrepreneurs du Sud-Vienne. Il s’agit de sauver l’économie locale, voire de la développer grâce à des échangeurs d’autoroute intelligents. » 

Les acteurs économiques sont las de voir le projet de liaison 2x2 voies entre Poitiers et Limoges, pourtant inscrit aux contrats de plan Etat-Région successifs, être réalisé par tronçons. Et parfois en simple 2x1 voie comme autour de Bellac. Fleuré a obtenu sa 2x2 voies en 2011 (40M€) ; Lussac-les-Châteaux aura son contournement en 2x1 voie à l’horizon 2023 (94M€)...

Une somme d’incertitudes 

Concernant l’entrée sud-est de Poitiers, qui accuse un trafic journaliser moyen de 18 000 véhicules/jour, la Dreal a soumis six scenarii à la population, courant mars. Objectif : restreindre le champ des possibles à deux fuseaux afin de concentrer les études à venir. Selon les critères pris en compte, la facture oscillerait entre 85M€ ou 103M€ (pour l’aménagement en 2x1 ou 2x2 voies de la traversée de Mignaloux-Beauvoir) et 172M€ pour un contournement au plus large par l’est (15,3km). 

Les deux premiers scenarii suscitent une levée de boucliers chez les Mignaliens. Une pétition lancée voilà trois semaines a recueilli 1 200 signatures. « Nous sommes opposés au tracé centre car il reconcentrerait le trafic sur des zones déjà saturées et en pleine agglomération », résume Elisabeth Leveque, porte-parole de l’association citoyenne Central Parc. Elle préfère à cette hypothèse « un délestage du transit national sur d’autres voies », tandis que « le trafic local resterait sur ce tracé, en imaginant des voies réservées pour les déplacements doux. » Ce qui reviendrait à « scinder » le trafic lié à l’activité économique des entreprises et les mouvements pendulaires domicile-travail. L’élue Europe Ecologie-Les Verts Eléonore Moncond’huy va encore plus loin, préconisant de « créer, ou bien souvent recréer, des transports quotidiens par le rail »

Même si l’aménagement de la RN147 est lent, lui superposer une autoroute semble pour le moins... redondant. « La faisabilité de l’aménagement d’une autoroute prendra en compte les projets réalisés ou à réaliser sur la RN147 », assure la préfète Isabelle Dilhac. Et ce même si,pour l’heure, rien n’est arrêté.  « Nous en sommes au stade d’identification et d’analyse du trafic, aucun résultat n’est fiabilisé sur la faisabilité, le tracé, les coûts... », précise la Dreal, qui rendra publiques ses conclusions en juillet prochain. 

 

Suite à l'article ci-dessus paru dans le n° 440 du 7, le collectif de Mignaloux Nord-Est a souhaité apporter quelques précisions. Il rappelle que six scénarii ont été proposés par la Dreal dont "deux autres tracés appelés Nord longs (scénarii 3 et 4) qui traversent les communes riveraines, et détruisent au passage 140 ha de terres agricoles (non respect de la loi ALUR du 24 mars 2014), apportant un risque de pollution à la nappe phréatique de Sarzec, qui représente 25% de l’approvisionnement en eau potable de Grand Poitiers, et ne décongestionnant la RN 147 que de 30% du trafic local, ceci pour un coût estimé à 155 et 172 M€, longueur : 13,8  et 15,3 km. (...) L’opposition aux  tracés Nord longs est forte, car ce sont les plus destructeurs en terme d’environnement, et les plus chers." Cette opposition est représentée par Accide, le collectif Mignaloux Nord-Est, le collectif du breuil-Mingot, Vent debout à Savigny, l’Association les Amis des deux rives «  de Mignaloux-Beauvoir, le collectif « Alternative 147 » Sud-Est de Mignaloux niveau route des Bruyères. Ces associations "proposent de nombreuses solutions alternatives ou parallèles au projet, pour développer les transports en commun (bus et train), le co-voiturage, pour demander l’aménagement des ronds-points de la Miletrie et du Breuil-Labesse, et la sécurisation de la RD 12 et RD 12C fortement accidentogène..."

À lire aussi ...