Hier
Jean-Daniel Ouvrard, 57 ans. Aérostier et photographe professionnel. Sa petite entreprise familiale propose des vols en montgolfière à tous les curieux de sensations fortes. Ce Châtelleraudais a transmis sa passion pour le ballon à ses fils dont trois pratiquent déjà la compétition.
Il a choisi d'établir son quartier général sur les hauteurs d'Antoigné. Un vaste bâtiment qui abrite depuis juillet dernier le siège de sa petite entreprise de sept salariés, Montgolfière Centre Atlantique, ainsi qu'un gîte. Depuis la terrasse, les plaines du Châtelleraudais s'étendent sur des kilomètres. La vue est impressionnante. L'aérostier Jean-Daniel Ouvrard ne pouvait pas s’installer ailleurs. Il a besoin de perspectives, de voir loin, sans jamais manquer d'oxygène. « C'est d'ailleurs depuis là-haut que j'ai repéré ce terrain. » Ce projet, « le dernier d'une telle ampleur », concède-t-il, a nécessité quatre années de réflexion et de négociations avec ses partenaires financiers et les artisans.
Ce mardi de mars, la salle principale a été soigneusement préparée pour accueillir une trentaine de pilotes de l’Hexagone, qui ont tous monté une petite affaire dans le but de proposer, comme lui, des vols en montgolfière. Seul ou en famille. Au menu : les nouvelles réglementations aériennes... De quoi garder les pieds sur terre. Au mur, est affichée une sélection des plus belles photos de ballons prises par le patron lui-même. Les clichés du ciel orangé de l'aube ou bleuté du crépuscule -les meilleurs moments pour s'envoler- attirent l'œil. Tout comme les paysages enneigés des Alpes, où le pilote averti part s'entraîner chaque année. La photo, c'est le début de l'histoire. Jean-Daniel Ouvrard a d'abord suivi des cours à l’école d’arts plastiques de Châtellerault, tout en gagnant sa vie en travaillant au rayon vins d’une grande surface. Au côté d’un Meilleur ouvrier de France, Jean-Christian Montgredin, il affine sa technique, jusqu’à ce jour de 1989 où ce dernier l’envoie réaliser un reportage sur le championnat de France de montgolfière qui se déroulait alors dans la Vienne. « Voler en ballon a quelque chose d’extraordinaire, j’ai été comme envoûté et beaucoup de gens m’ont dit la même chose par la suite. » Cette fascination pour cet objet massif de 25m de haut le conduit à découvrir l’art du pilotage auprès de Daniel, Bruno et Vincent Dupuis, alors aux commandes des ballons de la Fondation Ushuaia créée par un certain Nicolas Hulot.
Du trapèze à 3 714m du sol
Le 13 juillet 1994, le feu d’artifice est tiré avec un peu d’avance dans le cœur de Jean-Daniel Ouvrard, qui décroche son brevet de pilote de ballon libre (sic). Et depuis ? Les chiffres impressionnent… A son actif, 3 600 heures de vol, à raison de 180 décollages par an, soit un tous les deux jours. C’est l’une des meilleures moyennes françaises, assez remarquable au regard des conditions météo parfois capricieuses. Il les suit de près quotidiennement. « On reste toujours tributaires des vents. » Son record personnel d’altitude se situe à 4 359m, au-dessus du massif du Mont-Blanc. Et puis il y a eu ce défi contre l’apesanteur. Le 21 février dernier, l’aérostier a emmené l’artiste Isabelle Ponsot à 3 714m du sol, le temps d’un numéro de trapéziste vertigineux dans le vide par -24°C.
A force d'avoir le nez au vent, ses enfants ont évidemment chopé le virus. Ses trois aînés ont même déjà goûté à la compétition. Le quatrième, Eden, 13 ans, regarde encore passer les ballons. Rémi, 25 ans, salarié de l’entreprise familiale, pilote en duo avec son frère Aurélien, 33 ans, qui s’occupe de la navigation quand il ne travaille pas à Paris pour une startup dans l’humanitaire. Ensemble, ils ont décroché leur premier podium aux championnats de France, en 2017, à Villeneuve-sur-Lot, sur le lieu exact où se déroulera l’édition 2019 en août prochain. Prometteur. Paul, 19 ans, étudiant à Bordeaux, fait équipe avec son père. Le début d’une belle aventure. Si, à 57 ans, Jean-Daniel Ouvrard n’a jamais eu le plaisir de soulever un trophée national, il a terminé 67eparmi les 1 117 meilleurs aérostiers internationaux, lors de son unique participation à « la plus grande compétition de montgolfière du monde », en l’an 2000 à Albuquerque. Sa régularité fait de lui une référence dans son domaine et les amateurs éclairés ne s’y trompent pas. Ils viennent de loin désormais pour voler avec le maître et loger dans le nouveau gîte sur les hauteurs d’Antoigné, géré par Sandrine, la compagne de Jean-Daniel depuis trois ans. Ce marathonien, titulaire à l’origine d’un brevet d’Etat d’éducateur sportif multi-activités, n’hésite pas à mettre sa notoriété au service des bonnes causes. Chaque année, il offre six vols à l’occasion du Téléthon. Et a choisi d’investir dans l’une des rares nacelles adaptées au transport des personnes en situation de handicap moteur. « Un maximum de gens doivent pouvoir vivre cette sensation, de 7 ans jusqu’à une grand-mère de 101 ans qui a déjà volé avec moi ! ».
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