Les conciliateurs de justice existent en France depuis quarante ans. Reconnus par le monde judiciaire, ils restent méconnus du grand public. Ils sont quinze dans la Vienne, bientôt dix-neuf.
Le tribunal n’est pas une fatalité. Pour régler les petits litiges du quotidien, le décret du 2 mars 1978 a institué les conciliateurs de justice. Quarante ans après, leur existence reste méconnue des citoyens pour qui un litige de droit civil (entre voisins, de consommateur à commerçant, de locataire à propriétaire...) mène irrémédiablement sur les bancs d’une salle d’audience.
Or, « au XXIesiècle, dire le droit et rendre la justice ne sont plus l’apanage du juge », souligne le procureur de la République Michel Garrandaux qui, « face à une judiciarisation croissante de la société », reconnaît la pertinence de « modes alternatifs comme la médiation (ndlr,par les avocats) et la conciliation (ndlr,par les conciliateurs de justice).
A la suite de la fermeture des tribunaux d’Instance de Civray, Loudun et Montmorillon, la multiplication des dossiers ne permet pas toujours aux juges de s’engager dans une conciliation. le président du tribunal de Grande Instance Franck Wastl-Deligne en convient. Les conciliateurs interviennent pour faciliter des solutions à l’amiable, avant la saisine du tribunal. « Cela reterritorialise le service de justice, en lui donnant un ancrage local », constate Stéphane Winter, magistrat coordonnateur. En 2017, 1 300 jugements ont été rendus en matière civile dans la Vienne. Parallèlement, 502 conciliations ont abouti. »
Acteurs de dialogue
70% des conciliations ont lieu dans des mairies. Celle d’Availles-Limousine accueille une permanence chaque premier lundi du mois. « Dans une commune, le premier conciliateur est le maire. Nous sommes sollicités essentiellement pour des problèmes de voisinage. Or nous pouvons facilement être taxés de prendre parti pour l’un ou l’autre, note le premier magistrat Joël Faugeroux. Le conciliateur de justice, lui, arrive en terrain neutre et sa conciliation est mieux acceptée. » L’intéressé, Yves Augris, aquiesce : « Dans le milieu rural, on observe beaucoup de litiges de voisinage, et ce ne sont pas les plus simples, car une branche qui dépasse n’est souvent qu’un prétexte », constate l’ancien agent d’assurance.
Il est l’un des 15 actuels conciliateurs du département -dont une seule femme. Agents immobiliers, anciens conseillers prud’homaux, agents de l’inspection du Travail... Tous sont bénévoles et nommés par le président de la Cour d’appel de Poitiers sous réserve d’un casier judiciaire vierge et de trois années d’expérience juridique.
Quatre nouveaux entreront en fonction au 1erjanvier 2019, parmi lesquels Fabrice Charpentier. « La conciliation est au coeur de mon métier de proviseur-adjoint (ndlr, du lycée Raoul-Mortier de Montmorillon), analyse-t-il. Le métier de conciliateur est porteur dans la facilitation des rapports humains. » Car « un litige est avant tout une question de personnes »,assène le bâtonnier, Me Hervé Ouvrard. Tous en conviennent : médiateur est un métier -bénévole- d’avenir.
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En chiffres
15 conciliateurs de justice dans la Vienne.
37% de litiges conciliés en 2017.
70% de rencontres de conciliation réalisés dans une mairie.
28% des litiges concerne des baux d’habitation, 23% la consommation, 21% l’aspect immobilier du voisinage, 13% les nuisances de voisinage...