Confronté à un déficit, le centre hospitalier Laborit doit se démener comme de nombreux établissements de France avec des recettes en baisse. Les syndicats dénoncent une « logique comptable » dans une spécialité, la psychiatrie, qui implique des relations humaines.
Ce rapport était très attendu. Fin septembre, le cabinet indépendant Technologia a remis les conclusions de son audit mené auprès du personnel du centre hospitalier Laborit. Une enquête réclamée par le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de l’établissement. Et les résultats sont éclairants sur le vécu des agents. Près d’un quart (23%) des répondants « sont exposés de manière élevée ou très élevée au risque d’épuisement professionnel ». Neuf employés sur dix trouvent que les conditions d’exercice « se sont dégradées depuis 2015 ».
Du côté des syndicats, on pointe du doigt la « nouvelle organisation des services » mise en place cette année-là. « La direction veut fonctionner comme dans un service de médecine-chirurgie-obstétrique, estime Eric Plat, délégué CGT à l’hôpital. S’il manque un agent dans une unité, on va le chercher ailleurs. Les collègues se retrouvent ainsi du jour au lendemain avec des patients qu’ils ne connaissent pas.» Et il conclut : « Le problème, c’est qu’en psychiatrie, la relation et la confiance comptent beaucoup. » Sur ce point, le directeur acquiesce. Du moins, Christophe Verduzier admet que « la réorganisation de 2015 doit être revue » et ouvre sa porte pour rediscuter « des modalités de management ».
Plan de retour à l’équilibre
Reste que ces négociations se dérouleront dans un contexte plutôt tendu pour Laborit. La dotation globale de fonctionnement versée via l’Agence régionale de santé stagne depuis 2017, tandis que les recettes générées par l’hospitalisation diminuent, virage ambulatoire oblige. Un autre phénomène est venu plomber les comptes de l’établissement. L’application de Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) à toute la fonction publique aurait entraîné une augmentation des charges salariales, non compensée par la dotation. Résultat, le centre hospitalier doit faire face à un déficit cumulé de 1,2M€ sur l’exercice 2017 et celui en cours. « Un plan de retour à l’équilibre est engagé », souligne le directeur. Ici, cela se traduit par une trentaine de lits fermés (sur 364) et une cinquantaine de postes supprimés -70 selon la CGT- sur 1 300.
Après les déclarations de la ministre de la Santé, assurant que la psychiatrie ne sera plus « le parent pauvre » de la médecine, cette situation fait désordre. D’autant qu’elle n’est pas isolée. La grève est reconduite depuis le 30 août à l’hôpital de Niort pour dénoncer un sous-effectif en psychiatrie. On se souvient aussi de la grève de la faim menée par le personnel de l’hôpital du Rouvray. Ce n’est pas non plus un hasard si le cri d’alarme des professeurs Bloyer et Lhorca (« Psychiatrie, l’Etat d’urgence ») est sorti le 12 septembre.
Le député Sacha Houlié a été appelé en renfort. Il a rencontré les équipes de Laborit le 14 septembre. Du côté des associations d’usagers, on courbe le dos en silence. Le président d’Argos 2001, Jacques Lavignotte, constate un « allongement des délais de rendez-vous pour le suivi en centre médico-psychologique, comme dans le secteur libéral qui manque de médecins ». De son côté, Yves Pétard, de l’Unafam86, regrette que la psychiatrie soit toujours maltraitée par les instances dirigeantes. En attendant d’y voir plus clair, les agents sont appelés à se mobiliser ce mardi dans la rue. A suivre.