Chasseurs de fuites

La déperdition d’eau potable dans les canalisations trouées est une source importante de gaspillage. Elle représente 1 litre sur 5 à l’échelle nationale. A Poitiers, une équipe d’agents traque les fuites en sous-sol grâce à un dispositif d’écoute très ingénieux.

Romain Mudrak

Le7.info

Chaque matin, le même rituel se répète au centre technique communautaire. Devant son écran d’ordinateur, Stéphane Pasquier visualise une carte de Poitiers sur laquelle figurent des balises vertes ou rouges. D’un seul coup d’œil, cet agent spécialisé dans la recherche de fuites dispose d’une vue globale sur toutes les déperditions potentielles détectées pendant la nuit sur le réseau d’eau potable. Comment ? Entre 2014 et 2016, Grand Poitiers s’est progressivement doté de dispositifs d’écoute installés sous le sol, directement sur les canalisations en fonte, qui offrent la meilleure résonance : 661 appareils exactement, réparties sur 600km de réseaux. Invisibles depuis la voie publique, ces grandes oreilles se mettent en route toutes les nuits, entre 2h et 3h, et captent les bruits inhabituels de gouttes ou de filets d’eau.

Cet investissement de 400 000€ a radicalement changé les conditions de travail des trois membres de l’équipe de recherche de fuites. « Auparavant, il nous fallait six mois pour parcourir l’ensemble du réseau, se souvient Stéphane Kriesmann, dans le service depuis treize ans. On allait écouter sur place. Si un tuyau cassait le lendemain de notre passage, on le voyait au moment où l’eau sortait sur la voie publique. Aujourd’hui, on signale la fuite importante aux collègues de la régie qui la réparent dans la journée. »

1 million de m3  économisé
Chaque point rouge sur l’écran entraîne quasi-systématiquement une intervention. Sur place, les « chasseurs de fuites » quadrillent l’endroit avec des « loggers ». Pour cibler encore un peu plus l’objectif, ils utilisent un « aquaphone », sorte de stéthos- cope géant qui se plaque contre le sol. Casque sur les oreilles, les agents atteignent une précision ultime. « Un mètre, ça compte quand les collègues creusent le revêtement avec la mini-pelle. Dans 98% des cas, on est bon », assure Stéphane Pasquier. Ces nouveaux moyens techniques ont eu un effet colossal. « Les déperditions d’eau ont largement diminué, se félicite Laurent Lucaud, élu en charge de la Régie d’eau. Le rendement est passé de 74,4% en 2013 à 87,9% fin 2016. Autrement dit, c’est un million de mètre cube que nous n’avons pas prélevé dans la nature (sur un total de 9 millions de m3, ndlr). »

Au final, seuls cinq kilomètres de canalisations en moyenne sont remplacés chaque année sur le territoire de l’ancienne agglo- mération à treize communes. En revanche, pour un déploiement sur l’ensemble de la communauté urbaine à « 40 », il faudra attendre l’harmonisation des pratiques avec Eaux de Vienne, qui co-gère les réseaux.

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