Village de marques : la Vienne opposée

C’est l’un des dossiers chauds de l’été. Acteurs du commerce, élus de Châtellerault, et Poitiers montent au créneau contre le projet d’un village de marques prévu en Indre-et-Loire, craignant un impact négatif sur l’activité commerciale du territoire.

Steve Henot

Le7.info

Dans quelques jours voire quelques semaines, on saura. La Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC) devra dire si oui ou non elle autorise l’implantation d’un village de marques à Sorigny. Deux cents magasins, sur plus de 20ha, pourraient voir le jour dans le Sud-Touraine, à 54 km au nord-est de Châtellerault, en bordure de l’A10. A ce jour, le projet porté par le Syndicat mixte de l’agglomération de Tours, semble avoir du plomb dans l’aile. Le 16 juillet dernier, à la surprise générale, la Commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) l’a rejeté par neuf voix contre, pour sept voix favorables et une abstention.

La preuve d’une forte mobilisation de maires des départements limitrophes dans les jours qui ont précédé le vote. Unique représentante de la Vienne conviée en CDAC -puisque concernée par la zone de chalandise du projet-, mandatée par le maire de Poitiers Alain Claeys, Patricia Persico se félicite de cette issue : « Certains élus ont pris conscience que ce modèle commercial est dépassé, que l’on veut aujourd’hui aménager le territoire dans l’équilibre et la cohérence, sans négliger nos centres-villes. » « Loire Valley village » verra-t-il tout de même le jour ? Président de la Fédération des acteurs économiques de Châtellerault, Stéphane Mercier préférait se montrer prudent au lendemain de la décision. « C’est une très bonne nouvelle, qui vient calmer notre inquiétude. Reste une vraie difficulté : il est délicat d’interdire à quelqu’un de s’implanter… »

« Des centaines d’emplois pour en détruire combien ? »

« Ce projet est vraiment bien construit, développe l’adjointe au maire de Poitiers en charge du Commerce et du Tourisme. Il y a quinze ans, on l’aurait signé des quatre mains. Mais ça va contre l’évolution du commerce. Auchan Sud ? Ça ne se ferait plus aujourd’hui. » « Loire Valley village est à contre-courant des politiques de revitalisation des centres-villes », renchérit Jean-Pierre Abelin, maire de Châtellerault. Stéphane Mercier lui emboîte le pas en insistant sur « l’incohérence » d’un tel projet avec le programme « Action cœur de ville » porté par le ministère de la Cohésion des territoires, dont la vocation consiste à redynamiser les centres-villes de 222 communes moyennes, dont Châtellerault. (*). « On nous annonce des centaines d’emplois créés (entre 600 et 700, ndlr), mais pour en détruire combien ? », déplore Patricia Persico.

Toutes ces réserves, le centre « Marques Avenue » de la Séguinière, à Cholet, y a aussi été confronté, avant sa sortie de terre, en 2005. Mais son directeur, Cédric Gay, veut insister sur la complémentarité de l’offre des villages de marques -des produits dégriffés à -30% minimum, toute l’année-, qui représenterait « une vraie alternative » aux commerces de centre-ville. « Les marques que l’on propose n’y sont pas présentes. » Le responsable n’oublie pas de rappeler aussi qu’un centre commercial -les « Arcades Rougé »- s’est implanté, quelques années plus tard, au cœur même de Cholet. Pour autant, et malgré la concurrence d’Internet, « nous sommes en constante progression », assure Cédric Gay. Ce qui traduirait donc une demande. Le directeur ne s’étonne donc pas de voir le modèle se développer, avec l’arrivée de « beaucoup de concurrents ». Dont « Loire Valley Village », programmé pour 2021 à Sorigny. Le permis de construire a déjà été déposé. Tout le monde est donc aujourd’hui suspendu à la décision de la CNAC.

(*) La convention entre l’Etat, la Ville et les partenaires du programme a été officiellement signée le 11 juillet.

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