Un dimanche par pertes et profits

Après Géant Casino à Beaulieu, au tour des hypermarchés Auchan de Chasseneuil et de Poitiers-Sud de se « plier » à l’ouverture dominicale. Cette décision répondrait à la demande de la clientèle. Qu’en est-il dans les faits ? Eléments de réponse, avec l’exemple d’Auchan Châtellerault, ouvert tous les dimanches depuis près d’un an.

Steve Henot

Le7.info

C’est fait. Les Auchan de Chasseneuil et de Poitiers-Sud sont désormais ouverts tous les dimanches, de 9h à 12h30. Une tendance qui se généralise parmi les hypermarchés de la Vienne. En mars dernier, déjà, le Géant Casino de Beaulieu optait pour l’ouverture dominicale.

Au sein des magasins concernés, cette décision est loin de faire l’unanimité. Des salariés y voient un net recul de leurs acquis sociaux. « Cela ouvre la voie à un dimanche travaillé toute la journée », s’insurge Sylvie Texier. Samedi matin, à l’entrée de l’hypermarché, la déléguée syndicale FO d’Auchan Chasseneuil tentait de sensibiliser la clientèle au respect du repos dominical. Pas si simple…

« Un constat très positif »

Car ces ouvertures seraient justement motivées par une forte demande du public. C’est en tout cas l’un des arguments soulevés par les différentes directions. « Il y a ceux pour qui ça dépanne, ceux qui veulent faire leurs courses sur un créneau plus tranquille et ceux qui n’ont tout simplement pas le temps de les faire en semaine », explique François Pulido, le directeur d’Auchan Châtellerault. Depuis le 27 août 2017, l’hypermarché est ouvert tous les dimanches matins, suivant ainsi la voie empruntée par les supermarchés. En près d’un an, « le constat est très positif, dit-il. Nous avons une bonne fréquentation. Notre offre est beaucoup plus large. Cela nous a permis de recruter, d’avoir plus de souplesse pour les congés et de dégager davantage de primes… Je n’ai aucun regret. »

Les syndicats ne le contestent pas. « Il ne faut pas se le cacher, ça marche, dresse Nathalie Turpault, représentante du personnel étiquetée CGT, même si l’on ne voit pas encore de réelle performance en chiffre d’affaires. » Pour Eric Rogeon, délégué CFTC, « c’est une illusion ». « La première année, ça marche bien, la deuxième, ça se stabilise et la troisième, ça périclite ». Le salarié d’Auchan Poitiers-Sud est d’autant plus remonté que « les élus se sont prononcés contre » ces ouvertures dominicales.

Les salariés partagés

Surtout, les salariés seraient finalement assez partagés sur la question. A Châtellerault, le syndicat CFTC -que nous n’avons pas été en mesure de joindre- aurait « validé et accepté » l’accord proposé par sa direction, alors que la CGT l’a rejeté catégoriquement. « Ils font bande à part », déplore Eric Rogeon. Ce manque d’unité constitue un vrai frein à la mobilisation des salariés. « Pour certains, c’est un petit complément de salaire et nous le comprenons, observe Nathalie Turpault. Mais il faut bien s’interroger sur la perte progressive des acquis obtenus par les anciens ! » Eric Rogeon l’admet, « la conjoncture du travail n’est pas propice à la contestation ».

De leur côté, les directions insistent sur la notion de volontariat et sur la constitution de « pools » d’étudiants -entre 15 et 20 par hypermarché- recrutés spécifiquement pour assurer ces ouvertures dominicales. « Le travail dominical est inscrit dans les derniers contrats de travail, ce n’est plus du volontariat ! », répond l’union locale CGT de Châtellerault. Quant aux étudiants, « ils ne vont pas tenir seuls la boutique » !

Vendredi, les organisations professionnelles ou territoriales de commerçants et les syndicats de salariés étaient réunis pour fixer les trois ouvertures dominicales de fin d’année, comme le prévoit l’arrêté préfectoral de 2017. Le sujet a évidemment été mis sur la table. « Pourquoi garder cet accord, alors que les hypermarchés vont ouvrir tous les dimanches ? », s’interroge Eric Rogeon. La tendance n’est pas encore systématique, mais « ça va le devenir », avance François Pulido. « Parce que les clients répondent présent. »

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