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Des téléconsultations en langue des signes
Catégories : Société, Social, Solidarité Date : mardi 19 juin 2018Depuis le mois de mars, le centre médico-psychologique (CMP) Signes du CH Henri-Laborit propose des consultations en langue des signes à distance, pour tout adulte sourd présentant un trouble psychologique. C’est une première en France.
Le déclic, le Dr Laurence Perault l’a eu au cours de sa toute première consultation avec une personne sourde. Malgré la présence d’un interprète, « l’expression n’était pas libre, le patient ne me regardait pas », se souvient-elle. Dans ces conditions, difficile de lui apporter aide et écoute. C’est cette frustration qui a poussé la psychiatre à se former à la langue des signes et à ouvrir, en 2016, le CMP Signes au centre hospitalier Henri-Laborit. « La communauté sourde est très importante à Poitiers, il était nécessaire de lui proposer des soins adaptés dans son mode de communication, pour faciliter l’accès, la compréhension et l’autonomie dans les soins en santé mentale. »
En France, il n’existe que quatre centres où les psychiatres sont capables d’échanger en signes : Paris, Lyon, Marseille et Poitiers. Trop peu pour toute la population sourde. « Rien qu’en Nouvelle-Aquitaine, il y a de vrais besoins médicaux », assure Laurence Perault. C’est à partir de ce constat qu’il a été décidé d’expérimenter la téléconsultation -par écran interposé, donc- en langue des signes. La première a eu lieu le 19 mars dernier.
Deux ans de réflexion
Un écran, une caméra et une connexion très haut débit. Le dispositif paraît simple, mais a tout de même nécessité deux ans de réflexion. Rien n’a été laissé au hasard, pour que la téléconsultation soit aussi fluide qu’un face-à-face. « Je dois porter des vêtements foncés pour que l’attention du patient se porte uniquement sur mes mains et mon visage à l’écran, explique notamment la psychiatre, accompagnée de Marianik Le Guen, intermédiatrice en langue des signes. Il fallait s’assurer que la technique ne freine pas l’expression. »
De l’autre côté de l’écran, le retour est positif. « Les deux premiers patients ont été très naturels, contents de s’être exprimés. » Ces entretiens ont ainsi permis d’établir un diagnostic précis et une conduite à tenir pour leur prise en charge. Soutenue par l’Agence régionale de santé, la démarche pourrait s’étendre à d’autres structures à l’avenir. « Il y a des besoins énormes en France, c’est certain. Ce serait bien de développer des soins spécifiques pour les enfants sourds. » Il reste encore beaucoup à faire pour la santé de ces personnes. « Former des professionnels à la langue des signes demande du temps, des efforts… Il faut y trouver un intérêt. Au CMP Signes, nous avons notamment pour projet de rencontrer les internes, pour les sensibiliser à ce sujet. »
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