Vers une autoroute Poitiers-Limoges ?

Des chefs d’entreprise de Haute-Vienne ont lancé un manifeste pour la construction d’une autoroute payante entre Poitiers et Limoges. Ils revendiquent déjà le soutien de 1 400 signataires et de toutes les organisations patronales. En revanche, leurs homologues de la Vienne se font beaucoup plus discrets.

Romain Mudrak

Le7.info

On n’est jamais mieux servi que par soi-même... C’est le credo des dirigeants d’entreprise de Haute-Vienne qui viennent de publier un « manifeste » réclamant la construction d’une autoroute à péage entre Poitiers et Limoges. « Tout le monde est d’accord pour dire qu’il faut améliorer le chemin muletier existant qu’est la RN147. L’Etat ne mettra pas d’argent supplémentaire. L’autoroute concédée nous semble la solution la plus pertinente pour le développement économique de notre territoire. » Ces paroles sont celles de Pierre Massy. Le président de la Chambre de commerce et d’industrie de Limoges porte cette idée depuis plusieurs mois. Son calcul est simple : il part sur une base de quatre mille véhicules par jour, la moitié du trafic actuel, et huit cents camions. Les premiers de- vront payer 0,15€ par kilomètre, les seconds 0,50€. De quoi engendrer une recette annuelle de 45M€. « Le modèle économique est connu. 1M€ justifie 15M€ de travaux pour les concessionnaires. Ils pourront donc lever 600M€ sans problème », reprend Pierre Massy. A cela, il ajoute les 200M€ du Contrat de plan Etat-Région actuel. Il ne res- terait donc qu’une « centaine de millions d’euros » à trouver.

Désenclaver la Haute-Vienne
« Des concessionnaires sont intéressés », poursuit celui qui est aussi vice-président de la Fédé- ration nationale des travaux publics. Malheureusement, il refuse de les citer. En revanche, il revendique déjà 1 400 signataires, « de l’artisan au gros industriel, ce qui représente 35 000 salariés ». Le Medef de Haute-Vienne soutient notamment l’initiative afin de « désenclaver le département », souligne son président Thierry Debourg. « Il faut près de deux heures et demie pour parcourir les cent vingt kilomètres qui séparent Poitiers de Limoges, c’est intolérable. Le temps presse. Nos entreprises doivent se développer vers l’Ouest. » Le gérant de Debourg Voyages poursuit : « On s’est reposé dans un premier temps sur nos politiques, on a également cru à la LGV. Main- tenant c’est à nous de faire des propositions. »

Le 27 avril, l’agence Reuters a diffusé une dépêche sur le fameux manifeste qui a été reprise par toute la presse nationale. Dans la Vienne, en revanche, l’annonce a fait pschitt. Il faut dire que les partisans de cette « A147 » sont plutôt difficiles à trouver. Aucune entreprise d’ici ne figure parmi les signataires. « Le manifeste n’était adressé qu’aux ressortissants de la Haute-Vienne », signale Thierry Debourg. Etrange pour un appel qui est censé séduire aussi les usagers du « 86 »... Tout aussi étonnant, le Club des entrepreneurs du sud-Vienne, les premiers intéressés potentiellement par cette voie, « n’est pas du tout associé » à la démarche.

2x2 voies Poitiers-Lussac 
Du côté des Conseils départe- mentaux de la Vienne et de la Haute-Vienne, on mise encore sur un doublement de la RN147. Les deux présidents ont écrit, en janvier, au Premier ministre et au président de Nouvelle-Aquitaine pour demander la « revoyure » du Contrat de plan Etat-Région. Pour le moment, ce dernier prévoit uniquement le financement du contournement de Lussac-les-Châteaux ainsi qu’une portion de 2x2 voies aux abords de Limoges. Gérard Sol, maire de Mignaloux-Beauvoir, élu en janvier à la tête de l’association « Avenir 147/149 Nantes-Poitiers-Limoges » a rencontré Pierre Massy en mars. Loin d’avoir été convaincu, l’élu plaide désormais en faveur d’un dédoublement des tronçons les plus fréquentés, Poitiers-Lussac et Bellac-Limoges. « Les parlementaires et les principales collectivités sont unis sur cette question. La ministre des Transports les a reçus. Nous attendons vivement la loi d’orientation sur les mobilités prévue en septembre pour débloquer la situation. » Reste à savoir si la ministre (Elisabeth Borne), ex-préfète de Poitou-Charentes, les écoutera.

À lire aussi ...