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Une égalité des droits qui ne fait plus débat
Catégories : Société, Social, Solidarité Date : mercredi 02 mai 2018Le 23 avril 2013, l’Assemblée nationale adoptait le projet de loi ouvrant droit au mariage et à l’adoption pour les couples de même sexe. Cinq ans plus tard, cette égalité semble être entrée dans les mœurs. Illustration dans la Vienne.
Le 6 juillet 2013, ils se sont dits oui. Ce jour-là, Bernard et Johnny -la soixantaine tous les deux- sont devenus le premier couple homosexuel marié de la Vienne, à peine deux mois après la promulgation de la loi sur le mariage pour tous. A la Bussière, petite commune (335 âmes) à l’est du département où les deux hommes vivent depuis plus de dix ans, la cérémonie n’avait surpris personne. « Une belle journée, tranquille », se rappelle Bernard, avec sobriété. Loin, finalement, des débats agités de l’époque. « Maintenant, tout le monde est passé à autre chose. »
« On a serré les dents pendant un an, à entendre des choses incroyables, horribles même, parfois de la part de nos politiques, confie Julien, 37 ans, dont le mariage est prévu pour la fin d’année. Aujourd’hui, tout ça se tasse, devient « normal ». Plus personne n’est étonné. » Marié dès 2013, à Poitiers, Christophe (*) reconnaît que la loi du 17 mai 2013 « a achevé la normalisation, d’une manière générale ». Sans vraiment bouleverser son quotidien. « Avec mon conjoint, nous avons toujours été perçus comme un couple. » Bernard abonde, avec simplicité : « On a toujours nos chevaux, nos chiens… On a une vie normale, comme tout le monde. »
« Pourquoi n’avions-nous pas les mêmes droits ? »
Tel que l’observait la sociologue Irène Théry, il y a quelques jours, dans les colonnes du Monde, « la loi sur le mariage pour tous est allée encore plus loin en reconnaissant que la relation homosexuelle pouvait, en tant que relation de couple, s’intégrer à notre système familial et à notre conception de la parentalité. » Pour les couples de même sexe, elle incarne surtout un progrès remarquable, sur le plan social. « Cela offre une protection pour nos enfants et nous sommes parents au même titre l’un que l’autre », témoigne Christophe. Un argument « essentiel » même, dans sa décision de s’unir civilement avec son compagnon. Cinq ans plus tard, la symbolique reste forte. « On a gagné un combat, soutient Julien. Pourquoi n’avions-nous pas tous les mêmes droits alors que nous avons les mêmes devoirs ? »
Depuis 2013, plus de 170 mariages entre personnes du même sexe ont été célébrés dans le département, selon les derniers chiffres de l’Insee. A Poitiers, on se refuse à communiquer le nombre d’unions homosexuelles célébrées à l’hôtel de ville, « pour éviter tout sentiment de discrimination ». Cette attention se retrouve jusque dans les textes, adaptés dans un souci d’égalité. On parle désormais d’« époux », sans aucune distinction genrée. « Comme pour tous les couples, assure Christine Sarrazin-Baudoux, adjointe en charge de l’administration générale. C’est quelque chose qui, finalement, est passé comme une lettre à la poste. »
Mais Julien, lui, n’oublie pas que le chemin a été long pour en arriver là. « Je ne sais pas si l’on mesure bien le progrès que ça représente… C’est sans doute arrivé un peu tard, mais ce n’est pas grave aujourd’hui. »
(*) Prénom d’emprunt
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