Aujourd'hui
Julien Laba, alias Lhomé. 42 ans. Châtelleraudais. Sort son deuxième album de rap le 16 février. Nom de code : « Tout est lumière ». Animateur d’ateliers d’écriture depuis dix-sept ans. Et aussi très fier de ses origines, entre Togo et Liban.
Et si l’art de Lhomé, c’était l’art de la patience ? Il lui aura fallu sept ans d’une persévérance sans faille pour décrocher un « featuring » avec son maître. L’élève au micro désargenté et le pape de l’école du micro d’argent -Akhenaton, vous l’avez reconnu !- ont accouché d’un duo inédit et inspiré baptisé « L’Architexte ». Le morceau, enregistré le 26 janvier 2015, figure en bonne place sur le deuxième album du rappeur châtelleraudais, « Tout est lumière ». Cinq ans après « L’ombre d’un amour », Lhomé bascule dans un univers de bienveillance et de positivisme assumés.
« Dans la vie, il ne faut jamais renoncer à ses rêves et faire preuve d’audace ! » En rencontrant son « Goliath », « l’artiste du Poitou-Charentes » a assouvi l’un de ses plus profonds désirs. Il raconte leur rencontre d’un ton serein et empreint de maturité. Lhomé fait « du rap pour les adultes », avec des textes sincères et profonds. Il y met sa plume et ses tripes, son corps et son cœur. Sa sensibilisé aussi. « Même si l’album est moins personnel et mélancolique que le premier », corrige-t-il. L’homme a grandi, « réglé des choses de son histoire ». En creux, on le perçoit comme un guide de confiance, une sorte de sage. « Je suis mon convoyeur sur une route que le succès déserte, je suis un voyageur. » Un voyageur de mots, panseur de maux.
« Je déteste les injustices de ce monde »
Depuis dix-sept ans, il distille « douceur et puissance » dans des ateliers d’écriture aux airs de séances thérapeutiques. En prison ou dans les maisons de quartiers, dans les écoles et les hôpitaux, à la ville comme à la campagne, Julien Laba imprime sa marque. Exutoire, le mot est lâché. « Ma violence, je la fais passer dans les textes. On a tous besoin d’évacuer nos émotions d’une manière ou d’une autre. Moi, je déteste les injustices de ce monde, qui empêchent des gens d’être eux-mêmes et de vivre comme ils l’entendent. » De ces séances cathartiques, l’enfant de… Lhomé, au Togo, retire une satisfaction sans borne. Il est d’ailleurs en train d’écrire un livre en forme de témoignage à l’intention de tous ceux qui « voudraient prendre la suite ».
« Papa, pourquoi tu fais ça ? »
En attendant de s’éclipser et, éventuellement de vivre de la musique, le père de trois enfants (15, 12 et 9 ans) montre le bout du tunnel aux gamins en errance. « Mon rôle, d’une certaine manière, c’est de leur indiquer où se trouve l’interrupteur de leur talent pour qu’ils appuient dessus. » Les « mercis », les « larmes » et les cadeaux suffisent à étancher sa soif de reconnaissance. « Ma vie est dans le don, je n’envisage pas les œuvres solitaires… » Seul regret au tableau des médailles : les sacrifices familiaux. « Au cours des dix dernières années, j’ai l’impression d’avoir englouti mon argent, mon temps et mon énergie dans la musique ! »
Lhomé mesure « le barreau immense de l’échelle » qui sépare sa passion de son éventuel futur métier. « Ma fille me disait il y a quelque temps : « Papa, pourquoi tu fais ça » ? C’est une vraie question. Mais en réalité, je vis comme ça, je respire avec la musique. » Ses influences sont diverses. Sur la carte du monde, « trois points cardinaux » comptent plus que tout : le Togo, sa terre de naissance, le Liban, d’où sa famille paternelle est originaire, et la France, creuset de son éducation. Dans « Tout est lumière », Lhomé a mis « des saveurs et des épices » des trois pays, avec notamment un titre baptisé Beyrouth. Son « histoire familiale complexe », Julien l’assume. Il dit n’avoir « presque aucun souvenir de son enfance ». Les seuls qui lui restaient, il les a distillés dans une chronique très touchante diffusée dans ces colonnes à la rubrique Regards. « Quand tu as fait tout l’orpaillage, la seule pépite qui reste, c’est la famille. » Parole d’Architexte.
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