Bénévoles, denrée rare et épuisée

Bien que le nombre de bénévoles continue d’augmenter en France, certaines associations peinent à recruter des volontaires. Surtout aux postes à responsabilités. Dans une société en évolution, l’engagement n’a plus tout à fait le même sens.

Arnault Varanne

Le7.info

Après six ans de bons et loyaux services, Hubert Poilane a quitté la présidence des Restos du cœur de la Vienne. Son successeur ? Il n’en a pas. Le retraité châtelleraudais est redevenu un simple bénévole, mais personne n’a voulu prendre sa place. Du coup, un administrateur délégué expédie les affaires courantes, en attendant qu’une âme généreuse se dévoue. Le renouvellement des dirigeants bénévoles est un sujet d’inquiétude pour près de la moitié des responsables associatifs (44%) interrogés en 2017 par l’institut Recherches&Solidarités.

« La technicité de ces postes s’est renforcée depuis quelques années. Les bénévoles craignent de ne pas être à la hauteur de la tâche, surtout quand l’avenir de salariés est en jeu », note Dominique Denimal, travailleur social et auteur d’une thèse de sociologie intitulée « L’Engagement bénévole : entre logiques altruistes et profits individuels ». Selon lui, on en vient à « manager les bénévoles en fonction de leurs compétences comme dans les entreprises. Les plus grosses associations n’hésitent plus à recruter certains profils pour compenser les besoins. »

On la joue moins collectif

Et pourtant le nombre de bénévoles continue d’augmenter dans l’Hexagone. En 2016, 25% des Français se sont investis dans une activité gratuitement pour le plaisir. C’est cinq points de plus qu’en 2010. Dans la Vienne, le nombre de bénévoles est estimé entre 102 000 et 112 000, dont la moitié est très active. Mais cette réalité reste à nuancer. Les effectifs augmentent plutôt dans la culture et le sport. Et encore, lorsque les résultats sont bons. Le PB86 a perdu du monde au moment de sa rétrogradation en ProB. Eric Bergerot, « patron » des 160 bénévoles, regrette surtout que ce soit « les mêmes personnes depuis une dizaine d’années ». Depuis un an, le club a créé « l’académie du bénévolat » pour transmettre le savoir-faire et offrir une porte d’entrée aux nouveaux venus dans « la grande famille ».

L’environnement aussi est devenu un thème porteur. Vienne Nature et la Ligue de protection des oiseaux assurent accueillir de nouveaux bénévoles chaque année. La LPO 86 (11 salariés) revendique 874 adhérents, dont une cinquantaine « d’actifs » sur les nombreuses animations organisées pendant l’année. « Entre huit cents et mille personnes » déposent le fruit de leurs observations ornithologiques sur la base de données commune.

En revanche, la situation est moins favorable pour les associations sociales et caritatives. La Croix Rouge compte 160 bénévoles. Un effectif important, mais qui ne suffit pas à répondre à tous les besoins. « Nous avons énormément de mal à recruter, souffle Christian Joseph, son président. Cette pénurie est terrible. » Le manque de ressources humaines, c’est le premier sujet d’inquiétude (56%) cité par les responsables sondés par Recherches&Solidarités. « D’une manière générale, on assiste à une évolution sociétale vers plus d’individuation, reprend Dominique Denimal. Les gens peuvent consommer les services de l’association sans se sentir redevable. On accepte moins de se mettre totalement à la disposition d’une organisation pour bénéficier d’un sentiment d’appartenance. Et quand ils le font, ce n’est pas forcément pour la vie. » Fini l’engagement de père en fils. En matière de bénévolat, la priorité c’est désormais l’équilibre entre contraintes et plaisir.

 

Les chiffres qui détonent
Les retraités s’investissent plus ? Oui, mais… L’étude sur « La France bénévole » montre que les plus de 50 ans représentent encore 57% des bénévoles mais leur nombre a chuté de 7pts de 2010 à 2016. En revanche, l’effectif de bénévoles de moins de 49 ans bondit de 13pts (46%). Vous pensiez que les parents devenaient automatiquement bénévoles à la première licence de foot de l’aîné ? Eh bien, sachez que « l’activité des enfants » ne génère que 5% du bénévolat.

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