Des stages pour éviter la prison

Le 25 novembre marque la journée de lutte contre les violences faites aux femmes. A Poitiers, la justice vient de lancer des stages de responsabilisation à destination des conjoints violents. Ce dispositif existe déjà depuis une dizaine d’années en Haute-Vienne. Et il a fait ses preuves.

Florie Doublet

Le7.info

350. C’est le nombre d’affaires de violences conjugales que le parquet de Poitiers traite chaque année. Soit une par jour. Pour lutter contre les récidives, le procureur de la République de Poitiers Michel Garrandaux vient d’annoncer la mise en place de « stages de responsabilisation » destinés aux primo-délinquants (40% des dossiers).

Dès le premier coup, les auteurs devront s’acquitter de 250€ pour suivre cette formation censée les remettre dans le droit chemin. « C’est une alternative aux poursuites, tout en restant une décision de justice », affirme Nadine Delcoustal, directrice de Prism-Adsea86. L’association poitevine est missionnée pour animer ces stages, qui débuteront en janvier prochain. « Les conjoints participeront à cinq modules de trois heures tous les quinze jours, précise Nadine Delcoustal. Ce temps est nécessaire pour les amener à une véritable prise de conscience. » Cadre légal, représentations du couple, conséquences des violences sur la victime et les enfants… De nombreuses thématiques seront abordées pour permettre aux stagiaires de « trouver d’autres réponses que la violence ».

« Une mesure qui fonctionne »

Ce dispositif n’est pas nouveau. Ancien procureur de la République de Limoges, Michel Garrandaux avait déjà expérimenté son efficacité en Haute-Vienne. « Je constate très peu de récidives », confirme Magali Barre, éducatrice spécialisée de l’association Mots pour Maux. Depuis 2006, la structure limougeaude a accompagné 460 auteurs de faits « mineurs », dont 21 femmes. « Cette mesure fonctionne parce qu’elle leur permet d’identifier des interlocuteurs qui peuvent leur venir en aide, ajoute la travailleuse sociale. Leurs problèmes sortent enfin de la sphère privée, de l’intime. »

Un véritable travail d’introspection est demandé aux conjoints violents. « Je me souviens d’un homme qui a dégoupillé parce que sa femme l’avait traité de « bâtard ». Il m’a raconté qu’il n’avait jamais connu l’identité de son père… » Expliquer n’est évidemment pas excuser. Les stagiaires apprennent à déconstruire des schémas stéréotypés et des représentations éculées sur les relations homme-femme.

Ces stages ne peuvent être indiqués qu’en cas de plainte de la victime. Or, en France, elles sont seulement 14% à oser pousser la porte d’un commissariat ou d’une gendarmerie. Peur des représailles ou des répercussions sur la famille, crainte de ne pas être crue, honte… Les raisons sont multiples. « Certaines pensent aussi pouvoir « sauver » leur conjoint, indique Magali Barre. Mais elles ne parviendront pas à le faire changer seules. » Avec les stages de responsabilisation, l’espoir est permis.

À lire aussi ...