Etat d’urgence oblige, la sécurité est renforcée sur tous les festivals de l’été. Dans la Vienne, la facture explose pour les organisateurs, collectivités en tête, qui concèdent de gros efforts financiers.
Le 1er juillet, Chauvigny recevra Amir dans le cadre des Heures vagabondes. Et c’est peu dire que le candidat français de l’Eurovision 2016 déplace les foules en ce moment. 15 000 spectateurs sont attendus au complexe sportif, soit le double de la population de la ville. Face au risque terroriste, la préfecture a imposé des consignes exceptionnelles, répondant à l’état d’urgence en vigueur depuis l’attentat du Bataclan de novembre 2015. Toutes les garanties ont dû être prises pour empêcher l’intrusion de personnes mal intentionnées.
Le jour J, le site sera entièrement clos. Un kilomètre de barrière est prévu, ainsi que vingt agents de sécurité (lire ci-dessous), seize secouristes, une dizaine de tech- niciens de la Ville, les trois policiers municipaux et... des plots en béton contre les véhicules béliers. Sans oublier la mobilisation des forces de l’ordre, qui reste à la charge de l’Etat. La 1re adjointe Anne Brachet estime le montant de la facture pour la Mairie à 20 000€, dont 12 000€ rien que pour la sécurité. « En 2014, le concert d’Axelle Red nous avait coûté 8 000€ tout compris. Evidemment c’est un mal nécessaire car les fous sont partout, mais il faut pouvoir l’absorber au regard des contraintes budgétaires des collectivités. Sans oublier l’énergie déployée pour l’organisation... »
Solidaire avec Buxeuil
Les Heures vagabondes ont vocation à « rendre la culture accessible à tous sur l’ensemble du territoire départemental ». C’est louable ! Mais imaginez le déferlement de Superbus et de ses 10 000 groupies à... Buxeuil, dans le Nord-Vienne, commune de 1 000 habitants au budget annuel de 500 000€. Du haut de ses trente années de mandat, le maire Dominique Boireau a fait jouer son réseau pour que les communes voi- sines lui prêtent quatre cents mètres de barrières. Une centaine de béné- voles seront mobilisés histoire de faire baisser la note. Reste que seize agents de sécurité et la protection civile sont nécessaires.
Les dépenses engendrées par l’état d’urgence explosent. Et personne n’échappe à la règle. La « petite » association à l’origine du Lavoir électrique, à Vouneuil-sous-Biard, doit débourser 1 800€ contre 400€ auparavant, tandis que la Ville de Poitiers prévoit une enveloppe sup- plémentaire de 9 000€ pour organiser, au parc de Blossac, les concerts de Julian Perretta et Claudio Capéo.
L’esplanade de l’Hôtel de ville étant impossible à sécuriser. Selon une étude du Centre national de la chanson de variété et du jazz, le surcoût de sécurité dans les budgets de 87 festivals analysés s’élevait, en 2016, en moyenne à 42 970€ (soit + 2,7% par rapport à 2015). Les manifestations présentant un budget inférieur à 1,5M€ seraient les plus touchées. Autant de chiffres qui ne tiennent pas compte, en plus, de l’épuisement des organisateurs.
Heures vagabondes : un appel d'offres sécurité
"La sécurité est une question très importante pour le Département, argue Alain Fouché, vice-président en charge de la Culture. Nous avons donc lancé un appel d'offres auprès des sociétés privées de sécurité pour toutes les dates du festival des Heures vagabondes afin de faire bénéficier aux mairies des mêmes tarifs négociés." Après étude des dossiers de candidatures, la société Securit Dog Man a été finalement retenue.
Le poids de la sécurité privée
L’instauration de l’état d’urgence a-t-il créé des emplois au sein des sociétés privées de sécurité ? Le rapport d’activité de la branche pour l’année 2015 (derniers chiffres disponibles) souligne une croissance du chiffre d’affaires global du secteur de 6,5% (à 4,489Mds€). 58 000 embauches ont été enregistrées (+6%) en 2015, en forte augmentation par rapport à l’année précédente. Mickaël Lambert, responsable commercial de Securit Dog Man (120 personnes dans la Vienne), constate une hausse de l’activité depuis deux ans. Ses effectifs ont progressé de 15%. « Le recrutement d’agents est un enjeu fort. En particulier des femmes, seules autorisées à réaliser les palpations de sécurité d’autres femmes. » Spécialiste national de l’événementiel au sein principal syndicat du secteur (Snes), Ralph Bonan nuance le propos : « Les gros événements emploient des salariés quelques heures par mois. Avec l’état d’urgence, les sociétés ont dû réorganiser les plannings pour répondre à la demande, sans être en mesure pour autant de recruter en masse. »
Retrouvez notre dossier complet sur les retombées économiques des festivals de l'été ainsi que sur l'organisation des tournées estivales.