Musique, maestro !

Grégoire Renaudon. 38 ans. Directeur et programmateur du festival Au Fil du Son. A fait de Civray l’une des destinations culturelles phares de l’été en Vienne. Avance par étapes et fait de la simplicité son mot d’ordre.

Marc-Antoine Lainé

Le7.info

Le mercure affiche 29°. Les terrasses sont bondées. Grégoire Renaudon, lui, s’est installé au frais, à une table du café des Arts, à Poitiers. Sweat-shirt siglé « Au Fil du Son » sur le dos, le trentenaire avoue n’avoir « pas l’habitude de parler de (lui) ». Son rapport à la presse est généralement ciblé sur son rôle de directeur et programmateur du festival du Sud-Vienne. « Bon, mon parcours personnel est assez basique, lâche-t-il pour ouvrir la discussion. Je suis né et j’ai grandi en Charente, avant de partir quelques années à Toulouse, puis de passer mes années lycée à Civray. » Les détails sur l’enfance sont rares. « J’ai vécu pendant quinze ans avec ma mère, puis avec mon père. Mes parents sont des soixante-huitards, leur conception de la famille n’était pas conventionnelle. » Voilà pour les présentations.

Le 27 juillet prochain, Grégoire Renaudon et ses équipes ouvriront les portes de la 14e édition d’Au Fil du Son. Manu Chao, Jain, Dub Inc, Matmamah et Deluxe sont, entre autres, à l’affiche. Excusez du peu. « La fête promet d’être belle, on devrait battre nos records de fréquentation », sourit le « prog’ », annonçant un objectif de 25 000 personnes en trois jours. Depuis 2004 et le premier acte d’AFDS, les membres de l’association La Ch’mise Verte font se déhancher les festivaliers du Sud-Vienne.

« Mes rêves se transforment en fantasmes »

« Qui ne sont d’ailleurs pas tous Poitevins, loin de là ! » Mélomane ouvert d’esprit, il n’a toutefois jamais touché un instrument. « Plutôt que de jouer, je fais jouer. » L’idée de créer un festoche à Civray a germé après le lycée, dont Grégoire Renaudon garde un très bon souvenir. « Je n’étais pas mauvais élève, mais pas sérieux non plus. Je pensais plus à faire la fête qu’à mes cours. » Lorsque le CPE le charge d’organiser une soirée « Best Of », pour la fête du bahut, le Charentais se découvre une vocation.

Ses premiers pas dans le monde professionnel, Grégoire Renaudon les fait quelques semaines après le bac dans... la grande distribution. « J’avais besoin d’argent de poche pour vivre, alors j’ai passé un entretien au supermarché de Gençay. A ma grande surprise, j’ai été pris et nommé responsable des espaces extérieurs. » Passé directeur-adjoint d’une autre enseigne à Civray, puis de nouveau à Gençay, l’ancien élève d’André-Theuriet mène de front sa carrière professionnelle et celle, alors associative, d’organisateur de festival. « J’ai longtemps refusé de vivre de ma passion, mais cela devenait impossible. » Face aux semaines de 70h de travail, Grégoire Renaudon finit par se faire une raison et devient salarié de La Ch’mise Verte.

« Fier » du travail accompli

« Epanoui », de son propre aveu, il vit au rythme d’Au Fil du Son. Sa femme Hélène ? « Rencontrée sur le festival. Depuis, on ne se quitte plus. » Le couple a donné naissance à une petite fille l’an passé. « Un jour, un festivalier m’a dit : « AFDS, c’est plus fort que Meetic. » Il n’avait pas tort. » En regardant dans le rétro, celui qui se dit « calme mais exigeant » est « fier » du travail accompli. « Toutes les éditions du festival ont été marquantes. Chaque année, c’était différent. » Son job l’a conduit à côtoyer les artistes les plus renommés et à faire venir jouer à Civray des pointures. « J’ai pris conscience de toute l’économie du monde du spectacle, explique-t-il. Certains artistes ne pourront jamais venir à Civray, parce qu’ils coûtent bien trop cher. Mes rêves se transforment en fantasmes et le resteront. »

À 38 ans, cet autodidacte a compris les codes du monde de la musique. « Les artistes sont des êtres humains. L’été, ils sont sur la route tous les jours, dorment parfois dans le tour bus qui les amène à leur prochain concert. Forcément, ils sont plus exigeants. » Quand on l’interroge sur le futur, Grégoire Renaudon se montre lucide. « Nous avons réussi à faire d’AFDS ce qu’il est aujourd’hui parce que nous avons toujours avancé par étapes. Mon rêve, ce serait de transformer le centre-ville de Civray en enceinte du festival. Pour le reste, nous continuerons à faire plaisir aux festivaliers, avec nos moyens. »

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