Dora Aranyas. 28 ans. A quitté la Hongrie il y a cinq ans pour s’installer à Poitiers. A multiplié les expériences avant de se former à la pratique du yoga. Considère les voyages comme une manière d’en apprendre davantage sur les autres… Et sur elle-même.
Assise en tailleur sur son lit, Dora Aranyas raconte son histoire sans qu’aucun accent ne trahisse ses origines. La jeune Hongroise de 28 ans ne parlait pas un mot de français lorsqu’elle est arrivée à Poitiers, il y a seulement cinq ans. Originaire de Szeged, au sud de Budapest, elle a quitté le confort de son cocon familial et amical par simple… curiosité. « C’est très cliché de dire ça, mais la culture française, surtout la cuisine, m’a toujours attirée, sourit-elle. J’ai répondu à une annonce d’emploi de jeune fille au pair pour garder des enfants dont la maman était aussi Hongroise. Et puis voilà ! »
Aujourd’hui, Dora est une Poitevine dans l’âme. Cette passionnée de photographie s’est installée en plein centre-ville, dans un petit studio dans lequel rentrent à peine sa bicyclette, son tapis de sol et ses bouquins sur le yoga. Depuis quelques mois, elle enseigne cette discipline indienne qui mêle le corps et l’esprit. « Petite fille, lorsque je n’arrivais pas à me calmer ou à me concentrer, je me mettais naturellement en tailleur et je méditais, explique-t-elle. C’était totalement instinctif. Aujourd’hui, je comprends mieux pourquoi cela me faisait du bien. »
Dora… L’Exploratrice ?
Déjà titulaire d’un Master « Design et arts visuel », délivré par l’Université de Szeged, Dora est retournée l’été dernier à Budapest, pour passer son diplôme d’enseignement de yoga. « J’ai exercé plusieurs métiers : journaliste pour la télévision hongroise, animatrice d’ateliers à la Maison de l’Architecture et à l’Espace Mendès-France. J’ai beaucoup aimé ces différentes expériences, mais là, je pense avoir trouvé ma voie. »
Cette voie, c’est celle qu’empruntent ceux qui veulent « s’occuper des autres ». Dora aurait pu marcher dans les pas de sa mère et devenir assistance sociale, mais elle se considère « trop sensible ». « Ma maman, c’est un lion, un roc. Je ne pourrais pas vivre son quotidien, prendre certaines décisions difficiles comme séparer un enfant de ses parents violents… Moi, je ne peux pas. »
A sa manière, Dora aide aussi les gens en leur apprenant à « écouter leur corps ». « Le yoga est à la portée de tout le monde, il suffit de savoir respirer ! », plaisante-t-elle. Pour se perfectionner, la jeune baroudeuse est de nouveau partie en voyage, notamment en Europe. « J’ai voulu découvrir comment cela se passait ailleurs, je suis toujours curieuse de tout vous savez. C’est ancré dans mes racines hongroises. Chez nous, on encourage les enfants à être créatifs, à faire leurs propres choix. Quand j’ai voulu venir en France, cela n’a pas été facile pour mes parents, mais ils ont compris ma décision. » Elle les a d’ailleurs invités à découvrir son pays d’adoption et ils ont parcouru ensemble le Sud-Ouest. Ils ont été conquis.
« J’aime en français »
Dora, elle, pose un regard critique sur ses cinq premières années « à la française ». « J’ai beaucoup appris sur moi-même, sur qui je suis, quels sont mes besoins et mes envies, analyse- t-elle. Au début, ce n’était pas facile, je me sentais seule. Et puis, il y a la barrière de la langue. Vous parlez tellement vite ! Je captais les mots sans en saisir le sens. »
Finalement, c’est l’amour qui lui a permis de déceler toutes les richesses de la langue de Molière. « Quand on veut dévoiler ses sentiments, ce que l’on ressent vraiment, il faut être précis, avance-t-elle. Aujourd’hui je peux dire que j’aime en français, que j’argumente en français, que je me dispute en français et que je vis en français. » Pour autant, la jeune femme n’oublie pas d’où elle vient. « J’ai grandi au bord du Danube, à la campagne. Je resterai toujours une fille de l’Est. »