Hier
Des rives du Clain à l’eldorado financier de Dubaï, il y a un pas de géant. Que le Dr Ramzi Abou Ayache, néphrologue poitevin d’origine libanaise, a décidé de franchir il y a huit mois. L’histoire d’un homme ordinaire au parcours peu commun.
Il s’excuserait presque d’avoir attiré notre attention. Et d’être ainsi mis à l’honneur, alors qu’il s’est « contenté de changer d’horizon ». A dire vrai, son chemin de vie serait passé inaperçu, si les caméras d’une chaîne française ne s’étaient pas braquées, il y a quelques semaines, sur son destin atypique. « Le médecin de Poitiers a choisi Dubaï pour poursuivre sa carrière. » C’est à peu près en ces termes que le reportage plantait le décor. Ramzi Abou Ayache opine. « Oui, ce fut un vrai choix, dicté par la volonté de vivre une expérience insolite, loin des nombreuses amitiés et du cocon que je m’étais créés en terres poitevines. »
Le choix de la raison
Depuis mars 2012, le Dr Abou Ayache compte parmi les dix mille expatriés français de Dubaï. C’est là, au coeur de l’eldorado financier et touristique du Golfe persique, carrefour incontournable des riches hommes d’affaires de la planète, que l’Essonnais de naissance, Libanais d’origine, Poitevin depuis la fin des années 90, donne un nouveau sens à son existence. Dubaï, « un New York construit dans le désert », comme le décrit le Dr Abou Ayache. Une « ville bluffante, étonnante par ses structures, vivante jusqu’à des heures tardives ». Dubaï et « ses gratte-ciel, son culte du luxe et ses 90% de communautés étrangères ». Un vrai paradis, quoi ! « Oui, mais à condition d’avoir les moyens de suivre la «cadence», sourit l’intéressé. Ici, tout est cher. Les écoles, même françaises, la complémentaire santé, sont hors de prix. Quant aux loyers, ils sont semblables à ceux du XVIe arrondissement de Paris. Même si les salaires bruts sont plus élevés qu’en France, on est loin de rouler sur l’or. » Quand bien même l’argent et la tentation des paillettes l’auraient séduit, ils n’ont en rien guidé les pas du médecin spécialiste. « Dans le service du Pr Touchard, au CHU de Poitiers, je me suis trouvé une deuxième famille. J’y ai obtenu mon doctorat en médecine en 2000, puis mon diplôme de néphrologue. J’ai vécu des années merveilleuses, au côté de collègues formidables. Si je suis parti, c’est avant tout pour des raisons extra-professionnelles. » Notamment parce que son épouse, Libanaise elle aussi, commençait à souffrir de vivre loin de sa famille. « Ce déracinement nous a incités à prendre une décision radicale, raconte Ramzi. Mon profil de néphrologue transplanteur a convaincu des hôpitaux de Dubaï et Abu Dhabi. A Dubaï, vivaient la soeur et le frère de ma femme. Le choix a été vite fait. »
23% de diabétiques
En huit mois de vie «émirati», Ramzi, 43 ans, May et leurs deux filles, Lynne, 6 ans, et Diane, 3 ans, ont définitivement trouvé leurs marques d’exilés volontaires. Le papa, lui, goûte pleinement son bonheur de participer à l’amélioration de la prise en charge des soins, dans un état encore balbutiant sur le plan sanitaire.
« Quand on arrive à Dubaï, on se rend compte que les relations patient-médecin sont très distendues et que la confiance de l’un pour l’autre est plus que réduite. Cette défiance conduit bien des autochtones à consulter à l’étranger. Croyez-moi, en termes de santé publique, il y a énormément à faire ici… »
Au City Hospital, le plus grand établissement privé de la ville, Ramzi Abou Ayache s’est investi d’une mission suprême : développer la greffe rénale, sa passion de toujours, au coeur d’un pays qui possède l’un des taux de diabétiques les plus élevés au monde, avec 23% de la population atteinte. « C’est mon credo à moi », lance-t-il comme une prophétie. Et un retour en France, est-ce envisageable ? « Je crains que non, tranche l’ex-Poitevin. Sauf à aller saluer tous les confrères et amis que j’ai quittés à regret. » Un jour, peut-être…
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