En mars 2012, la communauté universitaire se choisira un nouveau président pour remplacer Jean-Pierre Gesson. Deux doyens ont déjà déposé leur candidature. Rencontre.
2012, année électorale. A Poitiers, le premier suffrage interviendra dès le mois de mars avec l’élection du président de l’université. A première vue, on pourrait croire que cette consultation opposera un candidat de rupture, Yves Jean, directeur de la faculté de Sciences humaines et arts (SHA), au digne héritier de la politique menée par l’équipe sortante, Dominique Moncond’huy. Mais dans les faits, c’est un peu plus compliqué.
Lui-même doyen de Lettres et Langues, ce dernier « assume le bilan de Jean-Pierre Gesson ». Difficile de le cacher, de toute façon, puisqu’il a rappelé, sur sa liste, trois des actuels vice-présidents : Hervé Sabourin aux relations internationales, Olivier Bonneau à la recherche et Stéphane Bellini pour les contrats avec les
entreprises. Toutefois, il refuse d’endosser le malaise provoqué par certaines décisions.
Crispation autour des formations supprimées
Le 11 juillet dernier, le conseil d’administration de l’université demandait de gros efforts financiers à tous les doyens. L’objectif ? Supprimer dix mille heures de formation afin de « dégager des marges de manœuvre pour des investissements transversaux comme l’aide à l’insertion professionnelle ou la mobilité internationale des étudiants ». Dominique Moncond’huy faisait figure de bon élève, car il venait justement de fusionner trois licences de langue à faible effectif en une formation plus attrayante. Mais ces coupes sévères ont été désapprouvées par une partie de la communauté universitaire. « Cette gestion comptable au tableau Excel nous a fait mal », confie un enseignant-chercheur.
« C’est vrai que l’arbitrage a parfois été brutal », concède aujourd’hui le doyen de Lettres. A l’époque, le conseil de SHA, présidé par Yves Jean, exigeait un « moratoire » pour cette décision, revenant à supprimer « l’équivalent de trois ans de licence de psycho » d’un seul coup. La scission avec l’équipe présidentielle devenait flagrante. Lui aurait préféré « prendre le temps de trouver des compromis » pour parvenir, par exemple, à « des modules communs à plusieurs masters ». Se positionnant comme le porteur d’une « nouvelle ambition collective pour l’université de Poitiers », ce militant du Snesup-FSU dénonce désormais « le manque de vision à moyen et long termes de l’équipe actuelle ».
Si l’université a échappé au déficit en 2010, il faut faire des économies. Dans un monde où la facture de l’énergie augmente aussi vite que diminue la taxe d’apprentissage, une partie du personnel a perdu confiance en l’avenir. « Des postes d’enseignants-chercheurs ont dû être gelés », souligne un cadre. Or, avec la dévolution de la masse salariale, le responsable n’est plus l’Etat mais le conseil d’administration lui-même. Dans ce contexte, on comprend que les deux candidats mettent en avant leur volonté de « retisser du lien social entre l’équipe présidentielle et les personnels ».
_______________________________________
Deux stratégies de campagne
Le 5 décembre, Yves Jean réunissait son « comité de soutien » à la Maison des étudiants (MDE). Une première. 182 personnes (essentiellement des enseignants-chercheurs) ont adopté sa profession de foi. En vrai homme politique (Yves Jean est conseiller municipal à Poitiers), il sait communiquer. Tout est prévu. Le jeudi 2 février, à 14h à la MDE, il présentera publiquement son programme et son équipe. De son côté, Dominique Moncond’huy reste plus discret même si lui a déjà dévoilé les noms de ceux qui l’accompagneront dans l’aventure.