Saint-Hilaire risque gros

Sur la place de Poitiers, Arnaud Clairand s’est forgé une sacrée réputation de « pourfendeur d’injustices ». Son combat du moment: faire reconnaître aux autorités que les travaux d’aménagement opérés, en 2009, dans et autour de l’église Saint-Hilaire n’ont en rien respecté les vestiges du seul site poitevin classé au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Nicolas Boursier

Le7.info

La défense du patrimoine local aiguise, depuis des lustres, la lame de sa détermination. Les autorités le savent fort en gueule, le tout- Poitiers le découvre tenace et belliqueux. Arnaud Clairand ne renie pourtant rien de ses montées au créneau. « Dès lors qu’elles sont fondées… » Pour le numismate professionnel, amoureux de l’histoire, des pierres et des hommes, la lutte contre l’injustice est un dard. Celle dont est, selon lui, victime l’église Saint-Hilaire  mérite, plus que tout autre, que glaive et bouclier soient brandis. A l’origine de son courroux, un permis délivré, en  septembre 2008, pour la construction d’un immeuble d’habitation de 14 mètres de haut sur l’emplacement d’un réfectoire médiéval de Saint-Hilaire. « Les travaux entrepris ont totalement dénaturé le lieu, explique-t-il. Pire,  plusieurs parties ont été détruites. » Parmi elles, « des contreforts extérieurs du XIIe, une arche du XIe et même une baie pré-romane datant du Xe siècle, aujourd’hui récluse derrière un pilier et un mur de béton. »

L’Unesco mène l’enquête

La préfecture a assuré à Arnaud Clairand que ce dernier vestige serait prochainement mis en valeur. Pour le reste, il ne voit rien venir. « L’autorisation de construction a été délivrée en toute impunité, peste-t-il. En juin 2009, contestant la validité des travaux, j’ai adressé un rapport d’une centaine de pages à l’Unesco. Surprise : ce dernier n’avait  même pas été prévenu encore moins consulté. » L’aménagement du seul site architectural poitevin classé au Patrimoine mondial de l’Humanité (c’était en 1998) aurait donc échappé à l’avis de la référence suprême. Inconcevable ! « Le dossier a été confié au Conseil international des monuments et des sites, poursuit Arnaud  Clairand. Deux experts ont été chargés de mener une enquête sur les détériorations subies par Saint-Hilaire. »

Le permis annulé ?

D’ici à la fin de l’année, ces experts devraient rendre leur verdict. Que peut-on en attendre ? « S’il est établi que ces travaux n’ont pas été effectués dans les règles, c’est-à-dire dans le respect du site, une annulation du permis de  construire et la démolition de l’immeuble incriminé peuvent être commandées. En ce sens, l’Unesco peut avoir son influence. » Le « Croisé » Clairand va plus loin. « Il faut que toute la lumière soit faite sur cette affaire et que les erreurs commises soient réparées. » Si elles ne l’étaient pas, Poitiers et Saint- Hilaire risqueraient même de perdre leur classement au Patrimoine mondial. « Dans l’histoire de l’Unesco, ce n’est arrivé qu’à deux reprises, en Arabie Saoudite et en Allemagne, pour des vestiges en partie détruits… par des travaux. » Cette extrémité-là, ni Arnaud Clairand ni  Poitiers l’historique ne sauraient l’envisager. (*) consultée par notre rédaction, la Mairie n’a pas souhaité réagir sur ce dossier, se réservant « le droit de le faire ultérieurement . »

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